Ce n'est écrit nulle part » zoom in http://blogue.nt2.uqam.ca/cenestecritnullepart Propos éphémères et littéraires de Bertrand Gervais Tue, 23 May 2017 14:21:28 +0000 en hourly 1 Zoom in sur Dresde: qui l’eût cru? http://blogue.nt2.uqam.ca/cenestecritnullepart/2010/06/24/zoom-in-sur-dresde-qui-leut-cru/ http://blogue.nt2.uqam.ca/cenestecritnullepart/2010/06/24/zoom-in-sur-dresde-qui-leut-cru/#comments Thu, 24 Jun 2010 15:01:18 +0000 Bertrand Gervais http://wordpress.nt2.ca/cenestecritnullepart/?p=897 Un événement inattendu s’est produit hier, quand j’ai fait mon zoom in sur la photo de Dresde, du site Mégapixel-Dreden.de.  Fasciné par cette photographie, présentée à juste titre comme la plus grande photographie jamais prise, j’ai voulu en montrer les extraordinaires qualités.

J’ai eu des difficultés avec l’édition de mon texte. Je voulais insérer une vidéo, une séquence captée à l’aide d’un utilitaire tout simple (ping) qui aurait montré les possibilités de zoom in et de zoom out de la photographie, mais en raison des formats de sauvegarde de la séquence, je n’ai pas été capable de la téléverser. Après cinq tentatives infructueuses, et une perte de temps non négligeable (une heure tout de même!), j’ai dû me rabattre sur trois photographies prises à des degrés de précision différents (du plus large au plus petit), images que j’ai mises au début, au milieu et à la fin de l’entrée (vous pouvez vérifier, c’est juste en dessous).

Je pensais en rester là, heureux de la découverte de cette image et de ses propriétés inattendues (il me semble qu’il y a plus à dire de cette image, de ce qu’elle fait en tant qu’image, mais ce ne sont que des balbutiements… J’y reviendrai sûrement plus tard, quand j’y aurai mûrement pensé). Je pensais en rester là donc, quand je me suis mis à regarder la dernière photographie, le gros plan de la fenêtre de l’édifice au toit rouge et à la façade couleur crème. J’avais resserré l’image sur la fenêtre et l’échelle de secours, et en examinant la vitre, j’ai aperçu une étrange réflexion. Il y avait comme une présence sur la photo. Quelque chose avait été saisi par l’objectif de la caméra qui ne devait pas s’y trouver.  Une présence. Mais de quoi?

dresde-tordu-1

Je me suis approché d’avantage, et c’est à ce moment que j’ai aperçu la chose. Je ne sais quel autre terme utiliser. L’image ne ment pas, du moins à ce niveau de précision. À première vue, je me suis raisonné en me disant que c’est une cagoule. Un homme en cagoule observe de sa fenêtre une scène que je ne peux pas voir (on se croirait dans Millenium de Stieg Larsson).  J’ai tenté d’écrire au photographe pour lui demander s’il avait aperçu cette présence à la fenêtre de l’édifice, mais je me suis dégonflé. Je me suis demandé s’il ne fallait pas appeler plutôt la police de Dresde, mais l’homme à la cagoule avait dû avoir le temps de quitter son poste d’observation. Peut-être de toute façon n’avait-il fait rien de mal? Sa cagoule pouvait être en caoutchouc, de celles utilisées lors  d’ébats sados-masos.

Je me serais contenté d’avoir découvert cette présence inattendue dans une fenêtre anonyme d’une ville que je ne connais pas, si je n’avais procédé à un ultime agrandissement.  Mon dos s’est subitement glacé. La figure qui avait été subrepticement captée par l’œil acéré de la caméra n’était pas celle d’un homme recouvert d’une cagoule, mais d’un être, comment dire, d’un être, oui d’un être d’une autre origine, plutôt reptilienne de prime abord, au visage étendu, aux yeux, comment dire, exorbitants, version tortue géante, d’un être donc, lâchons le mot, extraterrestre.

dresde-tordu-2

Je ne peux croire que j’ai écrit ce mot, moi, un écrivain patenté peu enclin aux débordements imaginaires (ouais, bon ça va, un petit mensonge une fois de temps en temps ne peut pas nuire). Mais cette image m’a glacé les veines. Cette forme alienesque m’a rendu tout chose, rabattu au rang d’un enfant sans défense. Ce sont des yeux exorbitants, une bouche aplatie, un nez effacé que j’ai vus à la fenêtre de cette immeuble de Dresde. Je ne l’ai pas inventé. Je vous laisse la photo en guise de témoignage irréfutable.

Voilà où j’en suis. Le zoom in a déjoué mes attentes.  L’image m’a révélé quelque chose que je ne voulais pas voir, quelque chose qui ne répondait pas à mes attentes, quelque chose qui m’envoûte, si l’envoûtement s’applique aussi aux choses qui nous effraient.

Où est Lovecraft quand on a besoin de lui? Sûrement tapi dans une photographie de Dresde…

]]>
http://blogue.nt2.uqam.ca/cenestecritnullepart/2010/06/24/zoom-in-sur-dresde-qui-leut-cru/feed/ 1
Zoom in sur Dresde http://blogue.nt2.uqam.ca/cenestecritnullepart/2010/06/23/zoom-in-sur-dresde/ http://blogue.nt2.uqam.ca/cenestecritnullepart/2010/06/23/zoom-in-sur-dresde/#comments Wed, 23 Jun 2010 10:35:35 +0000 Bertrand Gervais http://wordpress.nt2.ca/cenestecritnullepart/?p=864 dresde-1-capture

J’ai toujours détesté les pseudo zooms in qu’on nous présente au cinéma  ou à la télé.  Vous connaissez la scène : un homme (enquêteur de son métier ou journaliste) prend une photographie, qu’elle soit numérique ou analogique. Il remarque un détail intriguant et décide d’agrandir l’image pour mieux comprendre ce qu’il a capté par hasard. L’agrandissement, au lieu de devenir de plus en plus flou, pour l’argentique, ou alors pixellisé pour le numérique, devient au contraire de plus en plus précis. Et c’est bel et bien l’arme du tueur qu’on découvre sous un buisson ou alors une femme qu’on reconnaît sur un chemin.

Au cinéma, je me retiens pour ne pas hurler, lancer mon pop-corn à l’écran et sortir en trombe, criant au scandale. À la maison, je ferme la télé d’un geste impulsif et je m’enfuis râler dans mon bureau, maudissant les réalisateurs idiots de ce monde. Je connais quelques personnes pour qui ce sont les photos qu’on touche du doigt pour signifier le désir ou le deuil qui les irritent au plus haut point – et je les comprends, je partage leur étonnement de voir ce geste mille fois répété; mais moi, ce sont les pseudo zooms in qui me rendent fou. C’est simple, ils défient les lois de la photographie. Une image faite de pixels est… faite de pixels! Et plus on grossit lesdits pixels, plus ils sont apparents. Il n’y a pas plus de détails dans une image agrandie. Au contraire, il y en a moins!!!!! C’est l’enfance de l’art. C’est la même chose avec l’argentique. On rejoint la matière même de la photo.

Dresde-2-capture

La photographie de Dresde affichée sur Gigapixel-Dresden.de montre que de tels zooms in sont maintenant possibles! D’un seul mouvement, on passe d’une vue d’ensemble de Dresde à un détail de la photographie, une fenêtre par exemple, sans aucune perte de résolution. On ne rejoint jamais les pixels, l’image est précise, sans distorsion. Et de ce détail, on peut revenir à la vue d’ensemble de la ville. L’image possède une surprenante densité, comme si on pouvait bel et bien y pénétrer et l’explorer. Elle ne se défait pas sous nos yeux comme nous resserrons notre regard, elle reste entière. Et l’effet est surprenant.

Mais, une telle image est un exploit technique qui requiert d’importantes capacités informatiques. La photographie, selon le site,  « se compose de 1.655 photos en plein format, chacune de 21,4 megapixels pris par un robot en 172 minutes. Un ordinateur avec 16 processeurs et une mémoire centrale de 48 GB a besoin de 94 heures pour transformer 102 GB de données brutes. »

Rien à voir avec une photo d’enquêteur de film policier bas de gamme!

La seule chose qui me désole, c’est que, dorénavant, on pourra me répondre: tu vois, c’est possible de trouver un détail dans une photo…

Je hais quand le réel rejoint la fiction. Il ne me reste plus qu’à aller me trouver une photo que je pourrai toucher du doigt en pensant à l’être aimé.

dresde-3-capture

]]>
http://blogue.nt2.uqam.ca/cenestecritnullepart/2010/06/23/zoom-in-sur-dresde/feed/ 1