Culture populaire

La rassurante présence des déclassés

Paquet, Amélie
Paris, Grasset, 2002
222 pages.
Paris, Livre de poche, 2004
245 pages.
Dans les deux derniers romans de Virginie Despentes, Teen Spirit [2002] et Bye Bye Blondie [2004], les divisions de classe ne sont pourtant pas désuètes; elles sont bien au contraire au cœur des déchirements que vivent les personnages qu’ils mettent en scène. J’aimerais réfléchir à cette tension importante dans ces romans entre prolétaire et bourgeois afin de comprendre pourquoi Despentes juge pertinent d’utiliser ces nominatifs dans un contexte littéraire. Elle tire ces catégories de la culture politique punk de gauche radicale, qui s’est complètement réappropriée le vocabulaire marxiste.

Le sort des mécaniques défaillantes

Tremblay-Gaudette, Gabriel
Seattle, Fantagraphics Books, 2008
108 pages.

Le ton est donné: oscillant entre le sarcasme et la lucidité, l’univers d’Abandoned Cars a une portée carnavalesque au sens bakhtinien, à ceci près que les paysans ne renversent jamais le roi, même temporairement: ils ne cessent de croupir dans la misère d’une routine sans espoir. Néanmoins, Lane ne propose pas un traitement caustique de ces citoyens abandonnés par le rêve américain. Il ne fait pas plus preuve d’une approche misérabiliste: en optant pour un regard sobre et direct sur une brochette de personnages naïfs, illuminés, paranoïaques et déprimés, le bédéiste offre une vision de ces humanités ordinaires qui ne se distinguent que par leur inclusion dans une classe hétérogène, mais certes exclue du success story.

Raconter son histoire pour en donner une à celles qui n’en ont pas

Hope, Jonathan
Montréal, Héliotrope, 2009
144 pages.

Martine Delvaux écrit pour ne pas oublier la vie d’une petite fille qui naît dans un monde sans hommes quelque part sur la 417, à la campagne : «on disait la campagne pour ne pas dire les pervers et les fous dans les champs le long de l’autoroute». Une de ces campagnes minables où le secret était, à la fois, frappé d’une interdiction morale et dans les faits omniprésent. 

 

Québec taxidermiste

Asselin, Viviane
Montréal, Moult éditions, 2008
191 pages.

La capitale nationale serait (devenue) dépressionniste. C’est-à-dire laide, monotone, instrumentalisée, ennuyeuse, léthargique, aliénante, abrutissante: les adjectifs se multiplient pour montrer que Québec «se tu[e] de l’intérieur» (Québec, ville dépressionniste, p.10). Le discours n’est pas joyeux, mais la réalité l’est encore moins: la population mondiale serait manipulée par des instances supérieures –politiques, culturelles, sociales– qui contrôleraient son intelligence en la maintenant sous le joug de la déprime. Voilà en quels termes s’exprime le collectif de La Conspiration dépressionniste qui, mi-figue, mi-raisin, dénonce l’existence d’un complot international dont Québec ne serait qu’une victime parmi d’autres.

Syndiquer le contenu