Salon double - Tragique http://salondouble.contemporain.info/taxonomy/term/697/0 fr Ces poussières faites pour troubler l'oeil http://salondouble.contemporain.info/lecture/ces-poussieres-faites-pour-troubler-loeil <div class="field field-type-nodereference field-field-auteurs"> <div class="field-items"> <div class="field-item odd"> <a href="/equipe/brousseau-simon">Brousseau, Simon</a> </div> </div> </div> <div class="field field-type-nodereference field-field-biblio"> <div class="field-items"> <div class="field-item odd"> <a href="/biblio/infinite-jest">Infinite Jest</a> </div> </div> </div> <!--break--><!--break--> <div class="rteindent1 rteright">Come, come, and sit you down, you shall not budge.<br /> You go not till I set you up a glass<br /> Where you may see the inmost part of you.<br /> &mdash; Shakespeare, <em>Hamlet</em></div> <div> Peu de temps apr&egrave;s la publication d&rsquo;<em>Infinite Jest</em>, David Foster Wallace (DFW) discutait de son roman avec Michel Silverblatt &agrave; l&rsquo;&eacute;mission radiophonique <em>Bookworm</em><a name="note1" href="#note1a">[1]</a>. Interrog&eacute; sur ses motivations quant &agrave; l&rsquo;&eacute;criture d&rsquo;une &oelig;uvre d&rsquo;une telle ampleur&mdash;on parle d&rsquo;un texte faisant 1079 pages&mdash;, DFW affirme avoir voulu &eacute;crire un livre aussi amusant qu&rsquo;exigeant, et insiste sur l&rsquo;importance qu&rsquo;il accorde &agrave; l&rsquo;<em>effort</em> de lecture, avan&ccedil;ant que la relation du sujet contemporain &agrave; la culture se vivrait le plus souvent dans le confort de la facilit&eacute;. Ce rapport de facilit&eacute; &agrave; la culture est incarn&eacute; principalement, toujours selon DFW, par la t&eacute;l&eacute;vision et le cin&eacute;ma populaire, qu&rsquo;il range sans vergogne dans la cat&eacute;gorie du &laquo;low art&raquo;. Il s&rsquo;agit d&rsquo;&oelig;uvres divertissantes dont le but avou&eacute; est non seulement de r&eacute;pondre &agrave; l&rsquo;urgent besoin de plaisir qui habite l&rsquo;humain, mais aussi, bien s&ucirc;r, de g&eacute;n&eacute;rer des profits en y r&eacute;pondant: &laquo;TV and popular film and most kinds of &quot;low&quot; art&mdash;which just means art whose primary aim is to make money&mdash;is lucrative precisely because it recognizes that audiences prefer 100 percent pleasure to the reality that tends to be 49 percent pleasure and 51 percent pain<a name="note2" href="#note2a">[2]</a>.&raquo; <p>Un roman de l&rsquo;envergure d&rsquo;<em>Infinite Jest</em> repose sur le projet de s&rsquo;opposer &agrave; la facilit&eacute; de l&rsquo;art divertissant, tant par sa structure narrative complexe et par les th&egrave;mes qui y sont abord&eacute;s que par l&rsquo;engagement que sa lecture implique. Le nombre d&rsquo;heures n&eacute;cessaires &agrave; la lecture de cette brique agit de fa&ccedil;on d&eacute;cisive sur le lecteur, l&rsquo;exposant longuement &agrave; la tristesse du sujet contemporain qui appara&icirc;t, au fil du texte, &ecirc;tre l&rsquo;un des fils reliant entre eux les nombreux personnages de l&rsquo;histoire<a name="note3" href="#note3a">[3]</a>. C&rsquo;est pourquoi il me semble pertinent d&rsquo;aborder ici ce roman qui, bien qu&rsquo;ayant &eacute;t&eacute; publi&eacute; il y a quinze ans, demeure d&rsquo;une actualit&eacute; criante, tant par la r&eacute;flexion qu&rsquo;il propose sur la culture contemporaine que par le regard critique qu&rsquo;il porte sur l&rsquo;&eacute;criture de fiction. </p> <p><em>Infinite Jest</em> se d&eacute;ploie en un &eacute;cheveau et il est n&eacute;cessaire d&rsquo;en d&eacute;gager les fils narratifs principaux avant de poursuivre. L&rsquo;histoire se d&eacute;roule dans un futur<a name="note4" href="#note4a">[4]</a> o&ugrave; les ann&eacute;es ne sont plus compt&eacute;es en nombres, mais portent plut&ocirc;t le nom de diverses compagnies ayant pay&eacute; des droits pour, litt&eacute;ralement, passer &agrave; l&rsquo;histoire. Le c&oelig;ur du r&eacute;cit se d&eacute;roule lors de <em>The Year of the Depend Adult Undergarment</em><a name="note5" href="#note5a">[5]</a>. Le roman contient trois trames narratives principales qui se recoupent en de nombreux chass&eacute;s-crois&eacute;s. La premi&egrave;re trame concerne une acad&eacute;mie de tennis, Enfield Tennis Academy, o&ugrave; &eacute;tudie Hal Incandenza, un jeune surdou&eacute; &agrave; la m&eacute;moire exceptionnelle qui poss&egrave;de une vaste culture, en plus d&rsquo;&ecirc;tre d&eacute;pendant &agrave; la marijuana. La deuxi&egrave;me trame expose la vie des pensionnaires d&rsquo;un centre de r&eacute;habilitation pour drogu&eacute;s et alcooliques, Ennet House, qui se trouve en bas de la colline o&ugrave; est situ&eacute;e l&rsquo;acad&eacute;mie Enfield. Don Gately, un ex-toxicomane travaillant pour le centre, occupe une place importante dans cette partie. Finalement, une troisi&egrave;me trame met en sc&egrave;ne Marathe, un membre des <em>Assassins des Fauteuils Rollents</em>, ce groupe de terroristes qu&eacute;b&eacute;cois souhaitant que le Qu&eacute;bec se s&eacute;pare de l&rsquo;ONAN<a name="note6" href="#note6a">[6]</a> (Organization of North American Nations), c&rsquo;est-&agrave;-dire l&rsquo;union politique du Canada, des &Eacute;tats-Unis et du Mexique. Il faut pr&eacute;ciser que ces trois trames principales sont accompagn&eacute;es de nombreuses sc&egrave;nes secondaires o&ugrave; l&rsquo;on rencontre divers personnages qui ne participent pas de fa&ccedil;on directe &agrave; l&rsquo;intrigue. D&rsquo;ailleurs, l&rsquo;emploi du terme &laquo;intrigue&raquo; ne rend pas justice &agrave; la logique qui pr&eacute;vaut dans <em>Infinite Jest</em>, o&ugrave; l&rsquo;enjeu lectural ne se situe pas tant dans la d&eacute;couverte d&rsquo;un d&eacute;nouement que dans l&rsquo;exploration d&rsquo;une exp&eacute;rience collective du r&eacute;el, de la tristesse de ce r&eacute;el et des personnages qui l&rsquo;habitent. </p> <p>Il est &eacute;vident qu&rsquo;un commentaire de quelques pages ne peut suffire &agrave; donner ne serait-ce qu&rsquo;une id&eacute;e g&eacute;n&eacute;rale d&rsquo;<em>Infinite Jest</em>. Il me semble n&eacute;anmoins important de discuter, m&ecirc;me bri&egrave;vement, la fa&ccedil;on dont DFW pose la question de l&rsquo;empathie et de la place qu&rsquo;elle devrait occuper dans le travail du romancier contemporain. Pour le dire sans d&eacute;tour, l&rsquo;&eacute;crivain reproche &agrave; son &eacute;poque de favoriser un rapport individualiste &agrave; la r&eacute;alit&eacute;, renfor&ccedil;ant le penchant naturel qu&rsquo;aurait l&rsquo;individu &agrave; se consid&eacute;rer comme &eacute;tant le centre du monde. L&rsquo;empathie est d&eacute;crite par DFW comme &eacute;tant cette capacit&eacute;, cet effort que l&rsquo;humain peut et doit fournir, afin de se d&eacute;centrer et de pouvoir ainsi acc&eacute;der &agrave; l&rsquo;autre. Cet effort, cette volont&eacute; de penser le monde &agrave; partir de l&rsquo;autre est, pour DFW, <em>la vraie libert&eacute;</em>, et il en fait un projet d&rsquo;&eacute;criture: &laquo;The really important kind of freedom involves attention, and awareness, and discipline, and effort, and being able truly to care about other people and to sacrifice for them, over and over, in myriad petty little unsexy ways, every day. This is real freedom<a name="note7" href="#note7a">[7]</a>.&raquo; On le comprend, cette libert&eacute; &eacute;voqu&eacute;e par DFW implique un rejet du culte du moi et de l&rsquo;&eacute;gocentrisme qui r&eacute;gissent &agrave; bien des &eacute;gards les rapports sociaux de notre &eacute;poque. En ce sens, ses propos rejoignent la th&egrave;se d&eacute;fendue par Christopher Lasch dans <em>The Culture of Narcissism: American Life in an Age of Diminishing Expectations</em>, &agrave; savoir que l&rsquo;individu contemporain, en se repliant toujours plus sur soi-m&ecirc;me, devient inapte &agrave; conf&eacute;rer un sens &agrave; son existence, qu&rsquo;il appr&eacute;hende le plus souvent avec anxi&eacute;t&eacute;: &laquo;The new narcissist is haunted not by guilt but by anxiety. He seeks not to inflict his own certainties on others but to find a meaning in life. Liberated from the superstitions of the past, he doubts even the reality of his own existence<a name="note8" href="#note8a">[8]</a>.&raquo;</p> <p>Cette conception de l&rsquo;empathie, transpos&eacute;e dans l&rsquo;&eacute;criture romanesque, se traduit en un effort soutenu pour cerner la singularit&eacute; des diff&eacute;rents maux qui affligent les sujets contemporains: les angoisses li&eacute;es aux pressions sociales, la consommation de drogue v&eacute;cue comme moyen d&rsquo;&eacute;chapper &agrave; la vie imm&eacute;diate en alt&eacute;rant un r&eacute;el per&ccedil;u comme &eacute;tant l&rsquo;insupportable m&ecirc;me, sans oublier ces d&eacute;pressions s&rsquo;enracinant dans la banalit&eacute; du quotidien, d&eacute;voilant ce que ce mal-&ecirc;tre a de plus troublant, c&rsquo;est-&agrave;-dire le fait qu&rsquo;il soit incontournable. Cette attention soutenue, ce regard qui s&rsquo;efforce de comprendre la souffrance de fa&ccedil;on litt&eacute;rale et empathique, sans ironie ou cynisme, est pour DFW un authentique projet d&rsquo;&eacute;criture romanesque. Il s&rsquo;oppose par exemple &agrave; l&rsquo;&eacute;criture de Bret Easton Ellis, &agrave; qui il reproche de <em>seulement d&eacute;peindre</em> la noirceur du monde dans lequel on vit, sans toutefois chercher &agrave; proposer des possibilit&eacute;s de rendre le monde habitable. C&rsquo;est ce qu&rsquo;il d&eacute;plore du c&eacute;l&eacute;brissime et controvers&eacute; roman de Bret Easton Ellis, <em>American Psycho</em> (1993): </p></div> <div class="rteindent1"><span style="color: rgb(128, 128, 128);">Really good fiction could have as dark a worldview as it wished, but it&rsquo;d find a way both to depict this world and to illuminate the possibilities for being alive and human in it. You can defend <em>Psycho</em> as being a sort of performative digest of late-eighties social problems, but it&rsquo;s no more than that<a name="note9" href="#note9a">[9]</a>.</span></div> <div> Mais DFW ne s&rsquo;oppose pas seulement aux &eacute;critures qui s&rsquo;&eacute;vertuent &agrave; d&eacute;peindre le monde dans sa noirceur. Cette id&eacute;e de l&rsquo;importance de l&rsquo;empathie et d&rsquo;un effort sinc&egrave;re pour comprendre les humains va de pair avec un rejet d&rsquo;une certaine pratique de la m&eacute;tafiction o&ugrave; la prouesse formelle devient une fin en elle-m&ecirc;me. DFW en fait m&ecirc;me une avenue possible pour d&eacute;passer la m&eacute;tafiction, dont on conna&icirc;t l&rsquo;importance aux &Eacute;tats-Unis. Celui-ci &eacute;voque plusieurs &eacute;crivains, dont William T. Vollmann, Loorie Moore et Jonathan Franzen<a name="note10" href="#note10a">[10]</a>, qui appartiennent selon lui &agrave; cette nouvelle g&eacute;n&eacute;ration qui cherche &agrave; se d&eacute;barrasser des m&eacute;canismes de la m&eacute;tafiction, notamment de son ironie. Pour l&rsquo;auteur, il y a une distinction importante &agrave; faire entre l&rsquo;&eacute;criture et la lecture de texte qui fonctionnent en circuit ferm&eacute; (la fascination du monde universitaire pour les dispositifs narratifs, ind&eacute;pendamment des id&eacute;es qu&rsquo;ils supportent, en est un bon exemple) et les textes qui parlent du monde. Rejetant en bloc les discours visant &agrave; valider l&rsquo;&eacute;criture de fiction par le biais de pirouettes narratives exposant la sagacit&eacute; de l&rsquo;&eacute;crivain et sa compr&eacute;hension des m&eacute;canismes de l&rsquo;&eacute;criture, DFW adopte une posture r&eacute;solument du c&ocirc;t&eacute; de la vie, aux antipodes du solipsisme de ce qu&rsquo;il consid&egrave;re &ecirc;tre le propre de la mauvaise m&eacute;tafiction, c&rsquo;est-&agrave;-dire le retournement de l&rsquo;&eacute;criture sur l&rsquo;&eacute;criture, ce cercle parfait duquel la vie est exclue:</div> <div class="rteindent1"><span style="color: rgb(128, 128, 128);"><em>Fiction&rsquo;s about what it is to be a fucking human being.</em> If you operate, which most of us do, from the premise that there are things about the contemporary U.S. that make it distinctively hard to be a real human being, then maybe half of fiction&rsquo;s job is to dramatize what it is that makes it tough. The other half is to dramatize the fact that we still &quot;are&quot; human beings, now. Or can be<a name="note11" href="#note11a">[11]</a>. (Je souligne.)</span></div> <div> Cet appel &agrave; l&rsquo;ouverture et &agrave; l&rsquo;empathie peut, a priori, sembler clich&eacute; et moralisateur. Je pr&eacute;f&egrave;re pour ma part y voir une prise de position philosophique s&eacute;rieuse qui s&rsquo;appuie sur un constat troublant et difficilement r&eacute;futable, soit celui d&rsquo;un amenuisement des rapports sociaux r&eacute;ifiant le sujet contemporain en le r&eacute;duisant &agrave; une fonction qui l&rsquo;isole,&nbsp;celle du travailleur/consommateur. En cela, il me semble &eacute;galement que la r&eacute;flexion romanesque dans laquelle DFW s&rsquo;engage est &agrave; mettre en parall&egrave;le avec le travail amorc&eacute; par Peter Sloterdijk dans sa trilogie des <em>Sph&egrave;res</em>, par lesquelles celui-ci s&rsquo;&eacute;vertue &agrave; repenser l&rsquo;existence humaine en termes de relations et de transferts. Cette phrase, qui r&eacute;sume bien l&rsquo;esprit dans lequel est r&eacute;dig&eacute;e cette trilogie, pourrait sans l&rsquo;ombre d&rsquo;un doute se trouver en exergue d&rsquo;<em>Infinite Jest</em>: &laquo;Il faut &ecirc;tre au moins deux pour constituer une subjectivit&eacute; r&eacute;elle<a name="note12" href="#note12a">[12]</a>.&raquo; <p>&Ecirc;tre humain, dans <em>Infinite Jest</em>, c&rsquo;est &ecirc;tre l&rsquo;ar&egrave;ne o&ugrave; combattent, bien souvent jusqu&rsquo;&agrave; la mort&mdash;par suicide, &eacute;videmment&mdash;, le d&eacute;sespoir et l&rsquo;envie d&rsquo;&eacute;chapper &agrave; une condition jug&eacute;e insupportable. En ce sens, il est juste de dire que ce roman propose une vision tragique du monde; l&rsquo;emprunt du syntagme &laquo;Infinite Jest&raquo; au <em>Hamlet</em> de Shakespeare invite &agrave; suivre cette piste d&egrave;s le titre<a name="note13" href="#note13a">[13]</a>. Cette affirmation m&eacute;rite tout de m&ecirc;me d&rsquo;&ecirc;tre nuanc&eacute;e; il y a une ind&eacute;niable part de grotesque aux sc&egrave;nes tragiques, dans<em> Infinite Jest</em>, grotesque qui ne peut qu&rsquo;entra&icirc;ner le malaise du lecteur. Il suffit de penser au suicide du p&egrave;re Incandenza qui, bien que tragique, n&rsquo;&eacute;chappe pas au grotesque, celui-ci se donnant la mort en se faisant cuire la t&ecirc;te dans le four &agrave; micro-ondes. Il est difficile d&rsquo;&eacute;voquer cette copr&eacute;sence du grotesque et du tragique sans mentionner Schopenhauer, qui affirme, dans <em>Le monde comme volont&eacute; et comme repr&eacute;sentation</em>, qu&rsquo;il s&rsquo;agit l&agrave; du propre de l&rsquo;existence humaine: </p></div> <div class="rteindent1"><span style="color: rgb(128, 128, 128);">La vie de chacun de nous, &agrave; l&rsquo;embrasser dans son ensemble d&rsquo;un coup d&rsquo;&oelig;il, &agrave; n&rsquo;en consid&eacute;rer que les traits marquants, est une v&eacute;ritable trag&eacute;die; mais quand il faut, pas &agrave; pas, l&rsquo;&eacute;puiser en d&eacute;tail, elle prend la tournure d&rsquo;une com&eacute;die. Chaque jour apporte son travail, son souci; chaque instant, sa duperie nouvelle; chaque semaine, son d&eacute;sir, sa crainte; chaque heure, ses d&eacute;sappointements, car le hasard est l&agrave;, toujours aux aguets pour faire quelque malice; pures sc&egrave;nes comiques que tout cela. Mais les souhaits jamais exauc&eacute;s, la peine toujours d&eacute;pens&eacute;e en vain, les esp&eacute;rances bris&eacute;es par un destin impitoyable, les m&eacute;comptes cruels qui composent la vie tout enti&egrave;re, la souffrance qui va grandissant, et, &agrave; l&rsquo;extr&eacute;mit&eacute; du tout, la mort, en voil&agrave; assez pour faire une trag&eacute;die. On dirait que la fatalit&eacute; veut, dans notre existence, compl&eacute;ter la torture par la d&eacute;rision; elle y met toutes les douleurs de la trag&eacute;die; mais, pour ne pas nous laisser au moins la dignit&eacute; du personnage tragique, elle nous r&eacute;duit, dans les d&eacute;tails de la vie, au r&ocirc;le du bouffon<a name="note14" href="#note14a">[14]</a>.</span></div> <div> Pour ne donner qu&rsquo;un exemple de cette vision tragique de l&rsquo;existence propos&eacute;e par <em>Infinite Jest</em>, on peut &eacute;voquer Kate Gompert, cette femme d&eacute;pendante &agrave; la marijuana qui, apr&egrave;s trois tentatives de suicide, donne le choix &agrave; son m&eacute;decin de lui administrer des &eacute;lectrochocs ou bien de lui rendre la ceinture avec laquelle elle a tent&eacute; de mettre fin &agrave; ses jours... Cette lucidit&eacute; devant l&rsquo;immuabilit&eacute; du mal qui l&rsquo;habite a de quoi faire fr&eacute;mir le lecteur, et les mots le rapprochent peut-&ecirc;tre des secondes insupportables &eacute;voqu&eacute;es par Kate:</div> <div class="rteindent1"><span style="color: rgb(128, 128, 128);">&lsquo;I want shock,&rsquo; she said finally. &lsquo;Isn&rsquo;t part of this whole concerned kindness deal that you&rsquo;re supposed to ask me how I think you can be of help? Cause I&rsquo;ve been through this before. You haven&rsquo;t asked what I want. Isn&rsquo;t it? Well how about either give me ECT again, or give me my belt back. <em>Because I can&rsquo;t stand feeling like this another second, and the seconds keep coming on and on.&rsquo;</em> (p.74; je souligne.)</span></div> <div> Ce passage permet de saisir comment s&rsquo;imbriquent deux des th&egrave;mes majeurs d&rsquo;<em>Infinite Jest</em>, soit la solitude et l&rsquo;empathie. &Eacute;videmment, le probl&egrave;me de l&rsquo;empathie est indissociable de celui de la&nbsp; solitude et laisse entendre qu&rsquo;il y aurait <em>quelque chose</em> qui r&eacute;siste, entre les sujets, les emp&ecirc;chant de partager leur exp&eacute;rience du monde. Ce qui est triste &agrave; propos de notre temps, dit DFW, c&rsquo;est cette solitude, ce <em>quelque chose</em> qui fait &eacute;cran, emp&ecirc;chant l&rsquo;humain de vivre une relation <em>imm&eacute;diate</em> avec ses proches. Quelques pages avant de r&eacute;clamer des &eacute;lectrochocs, Kate Gombert insiste justement sur la radicalit&eacute; de sa solitude, les m&eacute;dicaments repr&eacute;sentant <em>tout ce qu&rsquo;elle avait dans le monde</em>:</div> <div class="rteindent1"><span style="color: rgb(128, 128, 128);">The doctor said could she tell him a little bit about why she&rsquo;s here with them right now? Can she remember back to what happen?<br /> She took an even deeper breath. She was attempting to communicate boredom or irritation. &lsquo;I took a hundred-ten Parnate, about thirty Lithonate capsules, some old Zoloft. I took everything I had in the world. (p.70)</span></div> <div> Si j&rsquo;insiste sur l&rsquo;impossibilit&eacute; qu&rsquo;ont plusieurs personnages d&rsquo;<em>Infinite Jest</em> &agrave; vivre une relation imm&eacute;diate &agrave; la r&eacute;alit&eacute;, c&rsquo;est qu&rsquo;il me semble que la tristesse de l&rsquo;existence, dans ce roman, est &agrave; mettre en lien avec les diff&eacute;rentes formes de m&eacute;diations qui participent de l&rsquo;exp&eacute;rience du monde contemporain. Par cela, le roman de DFW peut &ecirc;tre lu comme l&rsquo;exemplification de la th&egrave;se soutenue par Guy Debord dans <em>La soci&eacute;t&eacute; du spectacle</em>, qui veut que &laquo;[t]oute la vie des soci&eacute;t&eacute;s dans lesquelles r&egrave;gnent les conditions modernes de production s&rsquo;annonce comme une immense accumulation de <em>spectacles</em>. Tout ce qui &eacute;tait directement v&eacute;cu s&rsquo;est &eacute;loign&eacute; dans une repr&eacute;sentation<a name="note15" href="#note15a">[15]</a>.&raquo; De fait, un &eacute;l&eacute;ment majeur du roman est l&rsquo;intrigue qui gravite autour d&rsquo;un film, <em>Infinite Jest</em>, qui a &eacute;t&eacute; r&eacute;alis&eacute; par James Incandenza quelques mois avant qu&rsquo;il ne se suicide. Ce film, qui repr&eacute;sente dans le roman le divertissement par excellence, a la propri&eacute;t&eacute; du tuer son spectateur en lui procurant une dose l&eacute;tale de plaisir. Celui-ci n&rsquo;arrive plus &agrave; d&eacute;tourner son attention du film, source de plaisir intarissable, et meurt simplement d&rsquo;inanition. C&rsquo;est d&rsquo;ailleurs la raison pour laquelle les <em>Assassins des Fauteuils Rollents</em> tentent de mettre la main sur ce film, qu&rsquo;ils aimeraient bien distribuer dans les foyers des citoyens de l&rsquo;ONAN. <p>Cette id&eacute;e d&rsquo;un divertissement qui provoque un plaisir mortel gagne &agrave; &ecirc;tre mise en parall&egrave;le avec la solitude du sujet contemporain. DFW semble vouloir proposer, par de nombreuses sc&egrave;nes, que la relation de l&rsquo;individu &agrave; ce qu&rsquo;il consid&egrave;re &ecirc;tre la libert&eacute; soit totalement erron&eacute;e, puisque ce que l&rsquo;individu contemporain choisit, c&rsquo;est toujours le plaisir, sous diverses formes. Les exp&eacute;riences des drogu&eacute;s, des alcooliques et des citoyens friands de t&eacute;l&eacute;vision, en ce sens, peuvent &ecirc;tre pens&eacute;es conjointement en tant que sources de plaisir op&eacute;rant une m&eacute;diation entre le sujet et le monde, ajoutant une enveloppe (faussement) protectrice entre sa personne et ce qui s&rsquo;offre &agrave; lui. Ce qui est important de souligner, c&rsquo;est que ces diff&eacute;rentes sources de plaisir sont trait&eacute;es dans le texte comme autant de formes d&rsquo;ali&eacute;nation. Ainsi, la sc&egrave;ne o&ugrave; Marathe, membre des <em>Assassins des Fauteuils Rollents</em>, discute du libre arbitre avec Steeply, un repr&eacute;sentant des services secrets am&eacute;ricains, montre bien que la notion de choix pose probl&egrave;me dans la mesure o&ugrave; les citoyens n&rsquo;ont pas les moyens de choisir de fa&ccedil;on &eacute;clair&eacute;e, si bien que la possibilit&eacute; de mourir de plaisir, pour plusieurs, constitue sans doute un sort enviable:</p></div> <div class="rteindent1"><span style="color: rgb(128, 128, 128);">Marathe shrugged. &lsquo;Us, we will force nothing on U.S.A. persons in their warm homes. We will make only available. Entertainment. There will be then some choosing, to partake or choose not to.&rsquo; Smoothing slightly at his lap&rsquo;s blanket. &lsquo;How will U.S.A.s choose? Who has taught them to choose with care? How will your Offices and Agencies protect them, your people?&rsquo; (p.318)</span></div> <div> Plus loin, Marathe propose que la nation am&eacute;ricaine est de toute fa&ccedil;on d&eacute;j&agrave; morte, les citoyens &eacute;tant d&eacute;sormais incapables d&rsquo;effectuer le moindre choix &eacute;clair&eacute;:</div> <div class="rteindent1"><span style="color: rgb(128, 128, 128);">Someone or some people among your own history sometime killed your U.S.A. nation already, Hugh. Someone who had authority, or should have had authority and did not exercise authority. I do not know. <em>But someone sometime let you forget how to choose, and what. Someone let your peoples forget it was the only thing of importance, choosing</em>. (p.319; je souligne.)</span><br /> &nbsp;</div> <div>Ici, il faut se rappeler les propos de DFW au sujet des arts du divertissement, qui ne proposent rien d&rsquo;autre que du plaisir, niant par le fait m&ecirc;me tout ce qui est triste dans l&rsquo;existence, la solitude en premier lieu. Le jeune Hal, habitu&eacute; au fonctionnement rigoureux de l&rsquo;Institut de tennis d&rsquo;Enfield, explique par exemple aux plus jeunes que la solitude est la condition &agrave; laquelle ils sont tous condamn&eacute;s: &laquo;We&rsquo;re all on each other&rsquo;s food chain. All of us. It&rsquo;s an individual sport. Welcome to the meaning of individual. We&rsquo;re each deeply alone here. It&rsquo;s what we all have in common, this aloneness.&raquo; (p.112) Ce diagnostic, qui concerne d&rsquo;abord les jeunes athl&egrave;tes de l&rsquo;acad&eacute;mie Enfield, m&eacute;rite qu&rsquo;on l&rsquo;applique &agrave; l&rsquo;ensemble des personnages du roman et peut-&ecirc;tre &eacute;galement aux lecteurs. Dans l&rsquo;entrevue accord&eacute;e &agrave; Valerie Stivers, DFW exprime de fa&ccedil;on explicite ce lien qu&rsquo;il &eacute;tablit entre la tristesse, les m&eacute;dias de divertissement et l&rsquo;usage de drogues: </div> <div class="rteindent1"><span style="color: rgb(128, 128, 128);">I wonder why I'm lonely and doing a lot of drugs? Could there be any connection between the fact that I've got nothing to do with other people, that I don't really have a fucking clue what it is to have a real life and the fact that most of my existence is mediated by entertainment that I passively choose to receive<a name="note16" href="#note16a">[16]</a>?</span><br /> &nbsp;</div> <div>Il devient int&eacute;ressant, &agrave; la lumi&egrave;re de cette d&eacute;claration, de penser l&rsquo;articulation des th&egrave;mes de la solitude et de la d&eacute;pendance aux drogues et aux m&eacute;dias de divertissement, incarn&eacute;s de fa&ccedil;on tout &agrave; fait embl&eacute;matique par le film <em>Infinite Jest</em>. En effet, il est difficile de ne pas y voir un commentaire sur notre propre rapport aux m&eacute;dias, sur le semblant de relation au monde que leur fonctionnement induit. Le sujet contemporain appr&eacute;cie l&rsquo;art divertissant, dit DFW, parce que les m&eacute;dias supportent des &oelig;uvres faites uniquement de plaisir et lui permettent, en lui procurant une exp&eacute;rience esth&eacute;tique heureuse, d&rsquo;oublier tout ce que sa vie a de triste. Cette fuite dans la fiction, devons-nous comprendre, n&rsquo;est pas tellement &eacute;loign&eacute;e de la mort effective des spectateurs du film <em>Infinite Jest</em>. <p>C&rsquo;est dans cette repr&eacute;sentation du divertissement, au c&oelig;ur d&rsquo;une &oelig;uvre qui s&rsquo;efforce de confronter le lecteur &agrave; la tristesse de la vie contemporaine, qu&rsquo;il faut voir l&rsquo;effort de l&rsquo;auteur &agrave; susciter l&rsquo;empathie de celui-ci. Si la t&eacute;l&eacute;vision, comme le propose DFW, conforte l&rsquo;illusion que nous ne sommes pas seuls, <em>Infinite Jest</em> cherche au contraire &agrave; lever le voile sur cette solitude. Il y aurait, dans l&rsquo;exp&eacute;rience de lecture que propose DFW, quelque chose qui rel&egrave;ve du sevrage, et donc de la douleur. Ce sevrage, on l&rsquo;aura compris, concerne l&rsquo;illusion m&eacute;diatique du bonheur socialement partag&eacute;. Celui-ci a une valeur positive, car il implique une forme de renouement avec la r&eacute;alit&eacute; imm&eacute;diate, le refus de l&rsquo;illusion de ce monde &laquo;100% plaisir&raquo; de l&rsquo;&eacute;cran qui, pr&eacute;cis&eacute;ment, <em>fait &eacute;cran</em> devant le tragique de l&rsquo;existence. Tragique qui, pour DFW comme pour Pier-Paolo Pasolini, r&eacute;side dans l&rsquo;amenuisement des rapports humains, et m&ecirc;me, peut-&ecirc;tre, dans leur simple disparition: &laquo;Je tiens simplement &agrave; ce que tu regardes autour de toi et prennes conscience de la trag&eacute;die. Et quelle est-elle, la trag&eacute;die? La trag&eacute;die, c&rsquo;est qu&rsquo;il n&rsquo;existe plus d&rsquo;&ecirc;tres humains; on ne voit plus que de singuliers engins qui se lancent les uns contre les autres<a name="note17" href="#note17a">[17]</a>.&raquo;&nbsp;</p></div> <hr /> <div> <meta name="Titre" content="" /><br /> <a name="note1a" href="#note1">[1]</a> L&rsquo;entrevue, qui a eu lieu le 11 avril 1996, est disponible en ligne: <a href="http://www.kcrw.com/media-player/mediaPlayer2.html?type=audio&amp;id=bw960411david_foster_wallace" title="http://www.kcrw.com/media-player/mediaPlayer2.html?type=audio&amp;id=bw960411david_foster_wallace">http://www.kcrw.com/media-player/mediaPlayer2.html?type=audio&amp;id=bw96041...</a> (site consult&eacute; le 21 novembre 2010). <p><a name="note2a" href="#note2">[2]</a> Pour en conna&icirc;tre davantage sur cette r&eacute;flexion que propose David Foster Wallace &agrave; propos de la t&eacute;l&eacute;vision et des divertissements, on consultera &agrave; profit l&rsquo;entretien de l&rsquo;auteur avec Larry McCaffery, &laquo;A conversation with David Foster Wallace&raquo;, En ligne: <a href="http://www.dalkeyarchive.com/book/?GCOI=15647100621780" title="http://www.dalkeyarchive.com/book/?GCOI=15647100621780">http://www.dalkeyarchive.com/book/?GCOI=15647100621780</a> (site consult&eacute; le 21 novembre 2010).</p> <p><a name="note3a" href="#note3">[3]</a> Dans une entrevue accord&eacute;e &agrave; la revue <em>Stim</em>, l&rsquo;auteur affirme sans d&eacute;tour avoir voulu &eacute;crire &agrave; propos de ce qu&rsquo;il y a de triste dans l&rsquo;Am&eacute;rique contemporaine: &laquo;I wanted to do something sad. I think it's a very sad time in America and it has something to do with entertainment. It's not TV's fault, It's not [Hollywood's] fault and it's not the Net's fault. It's our fault. We're choosing this.&raquo; cf. Valerie Stivers, &laquo;Interview with David Foster Wallace&raquo;, Stim, Mai 1996, En ligne: <a href="http://www.stim.com/Stim-x/0596May/Verbal/dfwtalk.html" title="http://www.stim.com/Stim-x/0596May/Verbal/dfwtalk.html">http://www.stim.com/Stim-x/0596May/Verbal/dfwtalk.html</a> (site consult&eacute; le 25 novembre 2010).</p> <p><a name="note4a" href="#note4">[4]</a> Ce futur &eacute;tant celui du temps de l&rsquo;&eacute;criture, soit 1996, la lecture d&rsquo;<em>Infinite Jest</em> s&rsquo;av&egrave;re d&rsquo;autant plus int&eacute;ressante en 2010 qu&rsquo;elle met en sc&egrave;ne une certaine id&eacute;e de ce qu&rsquo;aurait pu &ecirc;tre notre &eacute;poque. Quelques rares indices, dans le texte, permettent de reconstituer la chronologie et de situer l&rsquo;action du roman &agrave; la fin de la premi&egrave;re d&eacute;cennie du 21e si&egrave;cle. Stephen Burn, dans son livre sur <em>Infinite Jest</em>, reconstitue savamment la chronologie du roman en affirmant, preuves &agrave; l&rsquo;appui, que l&rsquo;action s&rsquo;y termine en 2010, nomm&eacute;e non sans ironie <em>The Year of the Glad</em>. cf. Stephen Burn, <em>Infinite Jest, A Reader&rsquo;s Guide</em>, New York/London, Continuum Contemporaries, 2003, 96 p. </p> <p><a name="note5a" href="#note5">[5]</a> Pour le plaisir, voici les noms des autres ann&eacute;es mentionn&eacute;es dans le texte: (1) Year of the Whopper, (2) Year of the Tucks Medicated Pad, (3) Year of the Trial-Size Dove Bar, (4) Year of the Perdue Wonderchicken, (5) Year of the Whisper-Quiet Maytag Dishmaster, (6) Year of the Yushityu 2007 Mimetic-Resolution-Cartridge-View TP Systems For Home, Office, Or Mobile, (7) Year of Dairy Products from the American Heartland, (8) Year of the Depend Adult Undergarment, (9) Year of Glad. </p> <p><a name="note6a" href="#note6">[6]</a> Remarquons au passage que cet acronyme permet &agrave; l&rsquo;auteur de faire un jeu de mots savoureux, en d&eacute;signant les citoyens de l&rsquo;ONAN comme &eacute;tant des onanistes. Ce d&eacute;tail est important puisqu&rsquo;il t&eacute;moigne de la condition des personnages du roman, le plus souvent pr&eacute;occup&eacute;s bien davantage par leur propre plaisir que par celui des autres.</p> <p><a name="note7a" href="#note7">[7]</a> David Foster Wallace, <em>This is Water, Some Thoughts, Delivered on a Significant Occasion, about Living a Compassionate Life</em>, New York/Boston/London, Little, Brown and Company, 2009, p.120. Une version de ce texte sensiblement diff&eacute;rente est disponible en ligne: <a href="http://www.guardian.co.uk/books/2008/sep/20/fiction" title="http://www.guardian.co.uk/books/2008/sep/20/fiction">http://www.guardian.co.uk/books/2008/sep/20/fiction</a> (site consult&eacute; le 21 novembre 2010).</p> <p><a name="note8a" href="#note8">[8]</a> Christopher Lasch, <em>The Culture of Narcissism: American Life in An Age of Diminishing Expectations</em>, New York/London, W.W. Norton &amp; Company, 1991 [1979], p.VXI.</p> <p><a name="note9a" href="#note9">[9]</a> Larry McCaffery, &laquo;A Conversation with David Foster Wallace&raquo;, En ligne: <a href="http://www.dalkeyarchive.com/book/?fa=customcontent&amp;GCOI=15647100621780&amp;extrasfile=A09F8296-B0D0-B086-B6A350F4F59FD1F7.html" title="http://www.dalkeyarchive.com/book/?fa=customcontent&amp;GCOI=15647100621780&amp;extrasfile=A09F8296-B0D0-B086-B6A350F4F59FD1F7.html">http://www.dalkeyarchive.com/book/?fa=customcontent&amp;GCOI=15647100621780&amp;...</a> (site consult&eacute; le 21 novembre 2010).</p> <p><a name="note10a" href="#note10">[10]</a> D&rsquo;ailleurs, son roman <em>The Corrections</em>, r&eacute;cipiendaire du <em>National Book Award </em>en 2001, partage avec <em>Infinite Jest</em> ce projet d&rsquo;une litt&eacute;rature empathique s&rsquo;&eacute;vertuant &agrave; comprendre les malaises des sujets contemporains. Une lecture comparative de ces deux romans permettrait sans doute de saisir &agrave; quel point les projets romanesques de Franzen et de Foster Wallace ont beaucoup en commun.&nbsp;&nbsp; </p> <p><a name="note11a" href="#note11">[11]</a> Larry McCaffery, <em>Op. cit.</em> </p> <p><a name="note12a" href="#note12">[12]</a> Peter Sloterdijk, <em>Bulles. Sph&egrave;res 1</em>, traduit de l&rsquo;allemand par Olivier Mannoni, Paris, Hachette Litt&eacute;ratures (coll. Pluriel Philosophie), 2002 [1998], p. 59. </p> <p><a name="note13a" href="#note13">[13]</a> Cette allusion invite &agrave; penser <em>Infinite Jest</em> en termes tragiques, d&rsquo;abord parce qu&rsquo;Hamlet est une trag&eacute;die, mais surtout parce que le passage &eacute;voqu&eacute; traite de la mort, de la relation &agrave; l&rsquo;autre et de l&rsquo;empathie, th&egrave;mes centraux du roman de DFW. Il s&rsquo;agit d&rsquo;une r&eacute;f&eacute;rence &agrave; la sc&egrave;ne du fossoyeur (Acte V, sc&egrave;ne I), alors qu&rsquo;Hamlet d&eacute;couvre le cr&acirc;ne de Yorick, l&rsquo;ancien fou du roi, et exprime l&rsquo;horreur qu&rsquo;il ressent devant la mort de cet &ecirc;tre qui lui &eacute;tait cher: &laquo;Let me see. [<em>He takes the skull</em>]. Alas, poor Yorick! I knew him, Horatio&mdash;a fellow of infinite jest, of most excellent fancy. He hath borne me on his back a thousand times, and now how abhorred in my imagination it is! My gorge rises at it.&raquo; cf. Shakespeare, <em>Hamlet</em>, Paris, GF-Flammarion (coll. Bilingue), 1995, p.370. </p> <p><a name="note14a" href="#note14">[14]</a> Arthur Schopenhauer, <em>Le monde comme volont&eacute; et comme repr&eacute;sentation</em>, traduit de l&rsquo;allemand par A. Burdeau, &eacute;dition revue et corrig&eacute;e par Richard Roos, Paris, Quadrige/PUF, 2008, p. 404.</p> <p><a name="note15a" href="#note15">[15]</a> Guy Debord, <em>La soci&eacute;t&eacute; de spectacle</em>, Paris, Gallimard (coll. Folio), 1992 [1967], p.15.</p> <p><a name="note16a" href="#note16">[16]</a> Valerie Stivers, <em>Op. cit.</em>.</p> <p><a name="note17a" href="#note17">[17]</a> Pier-Paolo Pasolini, <em>Contre la t&eacute;l&eacute;vision et autres textes sur la politique et la soci&eacute;t&eacute;</em>, Besan&ccedil;on, Les Solitaires intempestifs, p.93, cit&eacute; dans Georges Didi-Huberman, <em>Survivances des lucioles</em>, Paris, Les &Eacute;ditions de Minuit (coll. Paradoxe), 2009, p.25. <br /> <meta name="Mots cl&eacute;s" content="" /><br /> <meta http-equiv="Content-Type" content="text/html; charset=utf-8" /><br /> <meta name="ProgId" content="Word.Document" /><br /> <meta name="Generator" content="Microsoft Word 2008" /><br /> <meta name="Originator" content="Microsoft Word 2008" /><br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> </p></div> http://salondouble.contemporain.info/lecture/ces-poussieres-faites-pour-troubler-loeil#comments Cinéma Contemporain Culture populaire DEBORD, Guy Délinéarisation Divertissement EASTON ELLIS, Bret Empathie États-Unis d'Amérique Fiction Foster Wallace, David FRANZEN, Jonathan Individualisme LASCH, Christopher Métafiction MOORE, Loorie PASOLINI, Pier-Paolo Publicité SCHOPENHAUER, Arthur SHAKESPEARE SLOTERDIJK, Peter Solitude Télévision Tragique Tristesse Roman Tue, 21 Dec 2010 00:19:07 +0000 Simon Brousseau 301 at http://salondouble.contemporain.info