Lecture-performance multimédia

J'étais hier à la fondation Cartier à une lecture-performance de Marcelline et Benoît Delbecq, "Vert pâle" présentée comme un hommage à la vie de l'actrice russe du cinéma muet Alla Nazimova. Une petite demi-heure avec projection, piano samplé en direct et texte tantôt lu par Marcelline Delbecq devant le public, tantôt pré-enregistré. Pas désagréable dans l'ensemble… sans plus, et le rapport de la brève fiction avec l'actrice ne m'a pas semblé des plus évidents… Seule évidence, la brève projection d'une séquence de muet où, soudain, l'écran prend toute sa force, la présence de la comédienne évidente et l'accompagnement au piano retrouve un rôle réel alors que jusque là il hésitait entre performance musicale et simple illustration de texte.

Quoi qu'il en soit, ce qui m'intéresse dans ces propositions de plus en plus nombreuses de lectures-performances, c'est qu'une certaine forme de littérature s'y cherche et veut s'y définir. De plus en plus de jeunes écrivains (c'est en effet plutôt le fait des jeunes écrivains-écrivaines) se confronte au multimédia comme si le livre ne leur suffisait plus et comme si, dès lors que l'on sort du livre, la lecture seule n'était pas satisfaisante, comme s'il y fallait une complémentation. Ils sont alors dans un autre domaine, celui du spectacle et la littérature y devient spectaculaire. Or le spectacle a ses exigences propres. Comment dès lors concilier ces deux pôles: faire un spectacle de la littérature sans tomber dans la mise en scène du texte ni demeurer dans la platitude de la lecture seule.

Les possibilités qu'offrent aujourd'hui les nouvelles technologies de créer dans tous les domaines avec facilité ne peuvent, me semble-t-il, que pousser à l'émergence de ce questionnement et amener de plus en plus d'écrivains à tenter de construire une littérature autre.

Source: Jean-Pierre Balpe dans HyperFiction .