ReCaptcha : 10 secondes rendues utiles

(Source: Sébatien Delahaye dans Écrans)

 

 

Les Captcha sont toujours difficiles à interpréter et considèrent l’internaute comme a priori coupable.

Après avoir créé en l’an 2000 le système des CAPTCHA, qui oblige les humains à prouver qu’ils ne sont pas des programmes informatiques en recopiant le texte d’une image, Luis von Ahn ne s’est pas assis sur ses lauriers. Le chercheur américain, conscient des limites de son système, a fait évoluer les Captcha. Fin mai, Von Ahn et son équipe ont mis en ligne ReCaptcha, nouvelle version du système. Le principe n’a pas réellement changé : le site propose une image contenant du texte déformé, que les internautes doivent recopier correctement pour pouvoir envoyer un message. Mais cette fois, au lieu d’un seul mot, l’image en contient deux, augmentant encore la difficulté.

Luis von Ahn a surtout voulu rendre son invention plus utile. « Chaque fois que quelqu’un résout un Captcha, ils gâchent 10 secondes de sa vie, expliquait Von Ahn au magazine américain Wired en juin 2007. En inventant les Captcha, je suis devenu le mec qui fait perdre du temps à tout le monde. Donc l’idée, c’était de trouver un moyen de rendre utile ces 10 secondes. »

La vraie nouveauté de ReCaptcha, c’est donc qu’il n’est plus un simple filtre antispam. Le système vise désormais à aider à la numérisation des livres en identifiant les mots que les logiciels de reconnaissance de caractères n’ont pas pu retrouver. Ainsi, sur chaque paire de mots à recopier, l’un des deux est inconnu. Si l’autre mot, connu de ReCaptcha, est bien recopié, le système en déduira que l’internaute a également correctement identifié le mot inconnu. Mot par mot, ReCaptcha espère ainsi aider au projet de la fondation Internet Archive, qui numérise des livres du domaine public anglophone. Un travail de fourmi effectué principalement par les internautes, qui devront donc déchiffrer des mots très peu lisibles. Et uniquement en anglais pour l’instant, bien que ReCaptcha travaille à des versions pour d’autres langues.

Mais cette nouvelle version des Captcha, plus sûre et plus utile ne résout pas les problèmes inhérents au système : les Captcha sont toujours difficiles à interpréter et considèrent l’internaute comme a priori coupable. Le système inventé par Luis von Ahn n’a donc pas que des partisans : « Nous pensons que la solution au spam ne passe pas par les CAPTCHA, expliquent ainsi Alain Vagner et Benoit Clerc, créateurs de l’antispam Spamplemousse pour le système de blogs Dotclear. Il n’y a aucune raison de pénaliser l’utilisateur qui veut mettre un commentaire sur un blog. Et les Captcha ne sont dans la plupart des cas pas accessibles, ce qui exclut les handicapés. Si on veut que le web reste ouvert à tous, il faut restreindre ces systèmes au minimum. »