Un atelier d'écriture partagée s'est déroulé le 25 mars, au laboratoire NT2, nouvelles technologies et nouvelles textualités, sous la direction de l'artiste Web Annie Abrahams.
L'artiste a réuni 16 participants relevant du domaine littéraire et des arts hypermédias. Avant de plonger les «écrivains électroniques» dans l'expérience d'écriture collaborative, Annie a fait un tour de table afin de permettre à chacun de prendre la parole. Elle a expliqué le concept de «l'écriture partagée» en ligne, en présentant deux de ses œuvres, soit «SolitudeS» et «ViolenceS», des projets réalisés sur le Web. Les internautes ont contribué à ces œuvres en partageant leurs opinions sur la solitude et la violence par des billets qu'ils ont écrits dans l'interface de ces sites. Les textes sont demeurés en ligne pendant plus de deux ans.
Durant l'expérience littéraire en direct de l'atelier, chaque participant s'est assis à un poste informatique et a écrit du texte, en s'inspirant des trois thèmes suivants, soit «Notre corps est la surface par laquelle la machine à accès au réel», «C'est quoi la folie? Quand, où, comment?» et «Parlez-moi de votre solitude électronique». À partir de ces prémisses, les participants ont dialogué ensemble via l'interface Web et ont disserté sur la question. Les bruits de tapotement de claviers, de soupirs et de rires pouvaient s'entendre, sans aucune cadence, dans une cacophonie presque mécanique.
Après la pratique d'écriture, les trois textes ont été imprimés et ont été remis aux participants qui les ont lus à voix haute pendant que l'artiste sonore, Kathy Kennedy, enregistrait le tout. L'enjeu était de rendre la création de ces œuvres, qui venaient d'être faites, vivantes, de donner une voix au mot, un rythme au dialogue parfois décousu, enfin, de faire du texte une musique. Il était, de plus, surprenant de voir à quel point le texte écrit en direct devenait alors poétique, comme en témoigne cet extrait de «Parlez-moi de votre solitude électronique» :
La solitûûûûDeeeee éééééééééééééééééééééééééélectronique!!! nous permet de se perdre dans la frénésie des connaissances inexactes, naviguer pour ne pas se noyer. Naviguer pour ne pas sombrer. (…) la solitûûûûDeeeee paf paf paf ! &?&?&?&?&? s'éloigne… s'éloigne… s'éloigne… malheureusement, nous ne sommes jamais seuls, connectés au réseau, à la matrice qui nous appelle sans cesse. collision frontale, dommage collatéraux supérieurs I wish i understood moi-même Je m'étourdis. Les moyens de communication se raffinent. Les problèmes de communications se complexifient. La solitûûûûDeeeee électronique m'est nécessaire, vitale et viscérale, j'en suis accroc la communication devient intense, labyrinthique une panoplie d'êtres seuls se rencontre pour transformère océane leur solitûûûûDeeeee en ligne, relier mélangé, tels les flux corporels au goût informatique.
Lors de la lecture des trois textes à voix haute, c'est la phrase, «la solitûûûûDeeeee éééééééééééééééééééééééééélectronique», qui a été interprétée avec le plus d’énergie. Elle est devenue, en quelque sorte, le leitmotiv de l'expérience. L'oralité a vite pris le dessus lors de la lecture, la sonorité a donné vie aux mots. Par la suite, Kathy Kennedy a demandé à l'assistance de chanter cet extrait. Elle a enregistré le chant et l'a mixé. Il est d'ailleurs possible d'entendre le résultat sur le site d’Annie Abrahams: http://www.bram.org/txt/indexuqam.html.
L'expérience d'écriture partagée sur le Web s'est déroulée amicalement dans une atmosphère de camaraderie où l'intimité et le plaisir étaient, sans aucun doute, de la partie.