Comme un roman

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TitreComme un roman
Type de publicationLivre
Année de publication1992
Auteur·e·sDaniel Pennac
Nombre de pages173
ÉditeurGallimard
VilleParis
Résumé

Résumé descriptif:

Partant d’une réflexion sur la lecture et le plaisir de lire, Comme un roman tente de retracer ce qui serait à l’origine d’un «malentendu» (p. 35) entre le lecteur et le livre. Pennac s’efforce également de désacraliser les rapports qu’entretient le lecteur envers le livre et la Grande Littérature, tant du point de vue culturel que pédagogique. S’attaquant d’entrée de jeu au dogme du «il faut lire» (p. 61) à tout prix, à «l’absolue nécessité de lire, qui fait l’unanimité» (p.69), il cherche à réconcilier le lecteur avec l’acte même de lire en rendant compte d’une vision de la littérature dégagée de la notion de devoir. L’auteur aborde ainsi le rôle du livre dans l’existence du «lecteur idéal» (p. 50) qu’est l’enfant, alors que la gratuité de la lecture consiste d’abord à étancher sa «soif de récit» (p. 117). Il passe ensuite à l’adolescent pour qui l’obligation de rendre des comptes sur ses lectures coupe «l’accès immédiat aux livres par la proscription du plaisir de lire» (p. 79).
 
En cela, l’essai de Pennac traduit ce plaisir par un ton non dépourvu d’un certain humour et par une forme qui renvoie au roman lui-même, à travers des mises en situation imaginaires mettant en relief les rapports qu’entretiennent enfants, pédagogues et parents à l’égard du livre et de la lecture. Aussi, tout en dialoguant avec des personnages fictifs, Pennac en appelle à notre responsabilité de parent ou d’éducateur dans la mesure où, si nous voulons que la jeunesse lise, «il est urgent de [lui] octroyer les droits que nous nous accordons» (p. 146). Droits imprescriptibles qui tiennent en la découverte d’une intimité particulière avec le livre, laquelle relève non pas tant de l’organisation de son temps, mais «comme l’amour, d’une manière d’être» (p. 124). Au nombre de dix, les droits du lecteur sont ceux de ne pas lire, de sauter des pages, de ne pas finir un livre, de relire, de lire n’importe quoi, de céder au bovarysme, de lire n’importe où, de grappiller, de lire à haute voix, de se taire.
 
Résumé interprétatif:
 
Écrire un essai comme s’il s’agissait d’un roman, tel semble être le défi que s’est donné Daniel Pennac alors qu’il propose, dans Comme un roman, une réflexion sur le plaisir de lire qui éprouve, justement, notre plaisir de lecteur. Façon, peut-être, de nous replonger «dans la solitude peuplée du lecteur» (p. 19), de rendre compte de la manière dont nous appréhendons le livre et la lecture tout en comblant le besoin de significations et de récits que chacun porte en soi. Mais ce que Pennac nous demande avant tout, c’est de s’interroger sur «l’ampleur d’une trahison» (p. 50), sur la «blessure d’amour» (p. 50) qui existe entre l’individu et le livre. Blessure qui met en relief ce qui nous tient à distance de la littérature ; le caractère «sacré» (p. 13) du livre, par exemple, en tant qu’objet et le dogme du «il faut lire» (p. 61) où le plaisir de la lecture se trouve annulé par «la peur (très ancienne) de ne pas comprendre» (p. 117) et par la contrainte du devoir à remettre.
 
Plus encore, si la blessure dont il est question relève d’une rupture, d’un malentendu entre le lecteur et le livre, il ne faut, pour expliquer l’hostilité des adolescents envers la littérature, «incriminer ni la télévision, ni la modernité, ni l’école» (p. 50). Au contraire, ce serait, pour Pennac, vouloir trouver de fausses réponses, vouloir, en quelque sorte, «résoudre le problème en supprimant son énoncé» (p. 66). Aussi nous propose-t-il de chercher l’origine de cette blessure au cœur même de nos habitudes de lecteur : dans nos rapports avec le livre lui-même, avec le temps que l’on s’accorde pour lire, avec la peur, le silence et la solitude. Autant de rapports qui rejoignent l’intimité que chaque lecteur entretient avec le livre comme avec lui-même. Pennac tente en outre de comprendre comment la lecture en est venue à être «ravalée au rang de corvée» (p. 52), à partir de quoi et de quand le plaisir de lire fut supprimé chez l’enfant, puisque «nous n’avons pas pensé tout de suite à lui imposer la lecture comme devoir. Nous n’avons d’abord pensé qu’à son plaisir» (p. 17). 
 
De fait, s’il apparaît pour Pennac que le plaisir de lire s’est égaré quelque part entre la maison et l’école, c’est que nous-même avons cessé de nourrir l’enthousiasme de l’enfant pour la lecture, de l’encourager dans ses efforts, afin de nous prouver notre propre compétence de pédagogue : «Nous étions son conteur, nous sommes devenu son comptable.» (p. 52) Pourtant, non seulement l’enfance est-elle le lieu des plus grandes découvertes et des plus grandes joies en matière de littérature, mais «nous formions, lui, le récit et nous, une Trinité chaque soir réconciliée» (p. 50) dans laquelle les livres participaient de cette «intimité paradoxale» (p. 120) entre nous et le monde, ils étaient les «compagnons d’être» (p. 162) que nous recherchions. C’est dire que la blessure d’amour dont souffre l’adolescent découle d’une série d’obligations dont celles de rendre public, par le «devoir de commentaire» (p. 72), ce qui était inscrit dans l’intime, de lire ce qui est imposé plutôt que de profiter de la liberté de choisir, de percevoir la littérature en tant qu’instrument pédagogique au lieu d’en apprécier la gratuité.
 
Somme toute, c’est à travers une vision de la lecture qui se présente comme «un acte de création permanente» (p. 26), du fait même qu’elle sollicite sans cesse l’imagination et les sens, que Pennac rend compte de questions telles que le style, la voix, la répétition, la durée, la solitude, le silence et le don. Questions qui renvoient autant au plaisir de lire qu’aux théories entourant le travail créateur, qui recréent, en quelque sorte, «l’illusion de l’amour» (p. 87).

Source : Interligne - UQÀM (http://www.interligne.uqam.ca/pages/liste_biblio.asp)