
L’œuvre Web de mémoire proclame haut et fort la nécessité de se rappeler. Elle raconte, retrace, représente, à partir d’un point de vue et d’un souvenir propre à un individu. Elle produit, comme le témoignage, un discours à effet de vérité, étroitement lié à l’évènementiel et à l’histoire. Si le témoignage travaille l’effet de direct car il est une parole en acte, l’œuvre de mémoire s’érige de son côté à partir d’un temps différé, celui d’un passé qu’elle met en représentation. L’œuvre de mémoire est une écriture de l’histoire, une figure de l’écho et du souvenir qui habite le présent. Elle est refus de l’oubli, impossibilité d’effacement, anamnèse qui actualise le passé dans l’expérience du présent.
Les modalités de la mémoire sont complexes. Les souvenirs sont individuels et forgent des mémoires collectives. Un même évènement sera raconté selon différents points de vue mais trouvera dans sa représentation polyphonique une saisie plus globale, son unité dans la diversité. La mémoire a également besoin de distance, ce qui peut parfois sembler en contradiction avec le temps synchronique d’Internet. Pour relever le pari difficile de la mémoire du direct, l’œuvre de mémoire hypermédiatique privilégiera néanmoins l’histoire récente et contemporaine. C’est ainsi qu’elle cherchera à nous éclairer sur le présent, en nous rappelant nos origines et nos parcours.
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Voices From Ravensbrück (navigation filmée #1)
Voices from Ravensbrück (2001) de Pat Binder présente des textes, poèmes et images produits par la communauté des survivantes du camp de Ravensbrück. L’image de la prison en est l’interface principale : chaque porte ouvre sur une voix qui exprime sa douleur, qui raconte par des photographies, des dessins ou des textes, ses expériences quotidiennes du travail, de la souffrance ou de la mort. L’oeuvre livre ainsi un récit polyphonique qui s’édifie à partir du modèle de l’écriture collaborative au sein de laquelle l’internaute devra déambuler pour en saisir la portée commémorative.
Réminiscence apocryphe (navigation filmée #1)
Réminiscence apocryphe (2011), réalisée par Annie-Ève Dumontier, Gil Nault et Étienne Dionne, se présente comme une errance photographique à travers divers lieux sacrés et symboles du patrimoine catholique du Québec. Un parcours de souvenirs qui ont imprégné fortement l’imaginaire culturel et identitaire de générations de Québécois mais qui s’effacent progressivement de la mémoire contemporaine.
A20 Recall (navigation filmée #1)
A20 Recall (2007) de Michelle Teran s’annonce d’emblée comme une évocation, comme un souvenir. L’oeuvre dresse la carte de la mémoire collective d’un événement marquant de l’histoire récente de la ville de Québec, la tenue du Sommet des Amériques de 2001. Ce sommet, également désigné comme A20, a surtout marqué l’imagination de la population locale par sa dimension répressive et violente.