C’est à Stephen King que je dois mes premiers émois de lecteur de romans. J’ai lu «The Shining» (1977) en cachette à onze ans; premier roman que je lus de ma propre initiative, dans une ambiance grisante de secret et de clandestinité. Je ne conçois toujours pas de meilleure porte, aujourd’hui, pour entrer dans le monde de la littérature que celle-là: montrez-moi un lecteur assidu de Beckett et de Proust, et je vous montrerai un adolescent qui a fait ses premières classes littéraires en lisant des auteurs comme King. Mais la suite de l’histoire se complique. Au cours des six années suivantes, j’ai lu du King à m’en écœurer. Et c’est à «It» (1986) que revient le mérite de m’avoir écœuré de ses histoires pour de bon. Depuis It, King semble publier ce qu’il veut, allongeant au kilomètre des romans plus ou moins bien ficelés, dans une apparente absence de contrôle éditorial, lui permettant de devenir une industrie à lui tout seul. Son nom fait confortablement recette, même si son imaginaire n’a pas su imposer à l’horreur moderne des figures aussi marquantes, iconiques, que celles de ses débuts.