De la vitrine du Atomic

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à la porte bleue des 3607-3609
rue Ontario des paupières closes
se gorgent des rayons du soleil

*

derrière toi une voix chuinte

c'est de même qu'ils ont gagné
comme Al Capone...
avec les taxes pis les impôts

*

sous l’enseigne Sico du Rona
des mains crispées sur des genoux
suivies d’un haut-le-cœur

*

un chien en laisse grelote
sous les mots Commissaire
à l'assermentation

*

sur la terrasse
trois chaises orange alignées
et autant serviettes de table
froissées

*

sur la terrasse un labrador sauce
son museau dans un café au lait

*

on effleure nerveusement
du pouce et des lèvres
le filtre d'une cigarette

*

deux mouches insistantes
volent autour d’une rousse
dans un verre perlé d’eau

*

un enfant à peine sorti
de l’âge adulte danse un slow
avec un tamtam

*

mercredi soir de show
d'un Marshall suintent power chords
et harmoniques

Martyna murmure
presque

*

un révolver en plastique
dans la main d’un enfant
vise les genoux de sa mère
ou de personne

 

*

par trois fois une femme
traverse la belle eau scintillante
chargée de boîtes d’ibuprofène

à chaque passage elle te dévisage

tu ne sais pas d’où elle vient
ni où elle va

*

dehors un adolescent
s’agenouille devant un chien
attaché à un arbre chenu

il pose son front sur celui du cabot
parle de longue minutes
se relève
puis lui gratte les oreilles
avant de quitter
les yeux rougis

de ton côté de la vitrine
un homme de Montréal
à ses dires froisse
un journal

il attrape
son téléphone
signale
le pose contre son oreille
inspire et grimace à l’endroit
d’un interlocuteur lointain

ben j’vas te dire
Georges
c’est une hostie
de formation pas claire
man

*

en période d’élections tu vas rire
de moi mais j'hésiterai
entre la CAQ et Québec Solidaire

*

un homme déglutit un ressac
d’americano et de croissant
on pose sa main sur son épaule
 

excuse-moi
es-tu Michael?

ah

bon
mauvaise personne
 

*

à ta droite un homme murmure
I'm trying to become
a line of pixels

*

devant Aliments merci
on fume la pipe et tient
de la main libre
une baguette

*

on ouvre la porte
what’s up Martin?

ça va
paraît-il

d’habitude
ce que je réponds c’est

« the sky »

what’s up?

*

une femme de l’Est
marche seule

dans ses mains une laisse
et rien au bout

*

je m’en crisse
d’Aladin

c’est pas comme s’il avait
montré son tapis magique bien roulé
dans un parc et l’avait brandi

devant tous les gens

comme un drapeau

*

jour de recyclage
une Astro et une Cavalier
crachent chacune un homme

l’un à barbe blanche et à pantalon de cuir
ou un autre avec un jacket des Cowboys
de Dallas et une tuque de marin

il ramassent boîtes en quantité
en vue d’un déménagement futur
sur Cérès
ou sur un ranch du Centre-Sud

*

dix heures dix
une grand-mère porte sa petite-fille

endormie
sur son épaule

*

au comptoir ça discute sérieux

qu’est-ce que tu considères
être le Plateau?

c’est d’abord une grosse bâche
étendue en haut de la côte

c’est des gens qui ont une espèce
de style de manière de penser

c’est des gens qui veulent créer
la campagne dans la ville

c’est des gens avec des mollets taillés
dans le marbre des sens uniques

*

sur un diable on empile
deux caisses de Molson Dry 10.1%
deux caisses de Bavaria pilsener 5.0%
deux gants de coton aux doigts troués

*

dans la vitrine du Atomic Café
des amoureux s'embrassent

et la 125 passe
moment magique

 

*

à grande bouchées
de saucisson
il marche vers l’ouest

*

devant trois cabots
qui attachés à l’arbre chétif te reluquent
des cartons mouillés sont déchiquetés
par les pas pressés
 

*

une punk à canne
est bousculée

par un titubant
de parc nocturne

*

une coupe Longueuil
est brossée devant
la tabagie-dépanneur rétro

*

logement à louer

j’ai perdu mes
cheveux à
force de
couper les prix

*

avec l’austérité
pis toute
une chance que Gérald
est là pour nous mettre
les pendules à l’heure

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Modalités du parcours: 

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