En quoi l’étude du deuil peut-elle contribuer à nourrir une intention de «désanthropologisation» de notre rapport aux végétaux?

4 sur 36

Réflexion éthique à partir de l’atelier « Tous du lichen », tenu lors des journées d’études Avec l’autre qu’humain: penser, agir et écrire les coprésences à l’UQAM

Chaque deuil est unique; il peut être écologique, personnel, partagé… Il s’agit de l’empreinte laissée en nous par la perte d’un amour dont la présence est révélée par l’absence. Il est ainsi spectral. Pendant l’atelier «Tous du lichen», Mélanie Binette et Alain Joule partagent les formes de mise en présence de l'autre qu'humain dans leurs pratiques artistiques.

Binette, dont l'œuvre est notamment traversée par la question du deuil, explique son désir de redonner de l’agentivité aux fantômes dans son art. Joule avance que pour lui, cette expression, « fantôme », se lit en fait «fente / Homme». Cette image me renvoie tout de suite au questionnement éthique qui m’habite ces temps-ci, soit l’importance de la «désanthropologisation» dans ma posture de chercheur dans un cadre d’analyse écopoétique.

Ce que j’y lis, dans cette nouvelle expression, c’est que dans la mort, le «fente / Homme» voit son «Humanité» rompue, il re/devient quelque chose d’autre, d’autre qu’humain. Puisque mes recherches concernent le deuil en relation avec la figure du jardin, je me méfie du «chauvinisme humain» (pour reprendre l’expression d’Una Chaudhuri) dont il est possible faire preuve lorsque l’on s’intéresse à la place des plantes dans la littérature. Je crois cependant qu’à l’aide d’une méthode de recherche dont l’éthique est rigoureuse, je peux me décentrer humblement et étudier le deuil dans sa qualité de phénomène rhizomatique.

Donna Haraway dans Vivre avec le trouble (2020) stipule que «[...] les êtres humains sont avec et de la Terre [...]» (p. 108-109). L’étude du deuil me permet de considérer les morts dans un devenir-avec les autres êtres vivants, un devenir terre, un devenir humus.

Ajouter un commentaire