Pourquoi topographier l’espace romanesque? Comment écrire les lieux? À l’aide de cartes, comme le font les géographes? On peut s’évertuer à confectionner des atlas de la littérature, mais on peut aussi aller plus loin qu’un simple repérage. D’ailleurs, les géographes eux-mêmes ne font pas des cartes dans le seul but de transcrire les lieux; toute carte répond à une motivation spécifique. Si la découverte première d’un espace fictionnel donne souvent l’impression de s’immerger dans un autre univers, l’analyse conduit à revisiter tous ces lieux devenus familiers et à saisir avec plus d’acuité les lignes de force, les paysages et les subtilités de l’espace romanesque. Entre les deux pôles du texte littéraire, l’écriture et la lecture, j’ai choisi de privilégier le second, pour la bonne et simple raison que c’est le seul que je connais de près, pour l’avoir expérimenté maintes et maintes fois, avec passion. Le critique littéraire, ou le chercheur en littérature, ne fait pas que traverser les lieux du roman en compagnie des personnages: vient un moment où il les incorpore à son analyse, parfois à son insu, où il se livre à une topographie romanesque. Dans quelle mesure les conceptions spatiales propres au lecteur colorent-elles la topographie qui en résulte? Sommes-nous condamnés à reconduire sans cesse les préconceptions ou les lieux communs dont nous sommes pétris? Le roman peut-il nous amener à «lire» la Terre autrement? Peut-il transformer notre rapport à l’espace réel? Afin de mieux comprendre l’élaboration des configurations spatiales, je prendrai comme point de départ un roman géographique: La quarantaine, de J. M. G. Le Clézio. Publié en 1995, il a pour cadre l’Océan Indien, et en particulier l’île Plate, située tout près de l’île Maurice.
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Ceci est la version préliminaire de l’article publié dans Audrey Camus et Rachel Bouvet, dir., Topographies romanesques, Rennes/Québec, PUR/PUQ, 2011, p. 79-91.
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