2000-2010

Freak Show

Le corps pose problème. Il naît, grandit, fait défaut, est amputé, meurt, se décompose… Le corps est ce qui fuit. Il s’enfuit à l’impératif de dire, d’écrire, de parler et de rencontrer. C’est avant toute chose un ensemble organique en souffrance, dans le manque comme dans la douleur. Face à une corporalité maladive, handicapée voir symptomatique, peut-on y entendre l’agonie d’une société qui se meurt en écho? Des regards se posent et questionnent. Une parole en quête de sens émerge. La représentation du corps dans «Like a Velvet Glove Cast in Iron» de Daniel Clowes est problématique. Cette bande dessinée présente un corps étranger, transformé, en mutation, s’ouvrant sur un regard qui renvoie à un malaise.

Posthume et postérité: un dialogue irrésistible

«Suite française» et «Les Bienveillantes» sont deux romans musicaux, construits et organisés comme des suites de tableaux-danses, dont les harmonies et les dissonances construisent un jeu troublant sur les conceptions sur la postérité du phénomène qui leur sert de leitmotiv: l’Holocauste. Pour le roman d’Irène Némirovsky, la question est d’autant plus vertigineuse qu’il s’agit d’une œuvre posthume. En effet, miraculeusement retrouvé et publié en 2004, plus de 70 ans après la mort de l’auteur à Auschwitz, à la suite des mêmes événements décrits dans son récit non autobiographique, «Suite française» participe non seulement d’une discussion sur la nature du posthume, mais aussi d’une interrogation sur le fonctionnement problématique de la réception dans des situations où le destin de l’écrivain est indissolublement lié à l’histoire de l’œuvre. Ce rapport se complique davantage dans le cas des «Bienveillantes», le roman de Jonathan Littell publié en 2006 et source d’acclamations et de critiques virulentes à la fois. Le lecteur est confronté d’abord à un narrateur difficile –nous y reviendrons–, ensuite à une sorte d’équilibrisme narratif entre fiction, morale et histoire et, finalement, à sa propre mémoire littéraire, récemment enrichie par la contribution décalée de Némirovsky.

Un roman inédit et inachevé de 1952 peut-il être avant-gardiste?

Depuis un an, Emmanuel Deronne a entrepris un travail assez complexe, nouveau pour lui et éloigné de sa spécialisation d’enseignant-chercheur en linguistique. Il s’agit de publier ou de republier une partie des œuvres de son père, le romancier Voltaire Deronne, alias Robert Reus (1909-1988). Les romans autrefois publiés, «La Foire» (1946; réédité en 2012) et «L’Épidème» (1947), ne trouveront à cette occasion «qu’» une seconde vie: ils ont déjà fait partie intégrante de la production littéraire de leur époque («La Foire» a figuré au dernier tour du prix Cazes). Mais les œuvres inédites (une vingtaine d’œuvres de 1945 à 1960 puis de 1973 à 1988 environ) posent ce problème d’une éventuelle naissance «postmaturée» et donc du statut étrange des œuvres du passé apparaissant dans l’horizon littéraire d’une époque qui n’est plus la leur et à laquelle elles n’étaient pas destinées.

Entre la honte et l’image

Nelly Arcan (Isabelle Fortier) s’est tuée le 24 septembre 2009. Le tranchant de son verbe, la précision constante de sa phrase prouvaient qu’elle traitait l’écriture en orfèvre, quel qu’en soit le support, de la publication au Seuil aux chroniques qu’elle publia dans le maintenant défunt hebdomadaire culturel de Québecor, Ici, qui furent d’ailleurs les seuls textes que je lus d’elle de son vivant. En apprenant qu’elle s’était tuée, je me rattrappai aussitôt, lisant tous ses livres en succession, non sans éprouver la honte de m’être mis à la lire parce qu’elle était morte. Je me sentais idiot.

Pour une écriture sous ecstasy: Beigbeder coke en stock

La consommation endémique de toute espèce d’excitant, si fréquente dans les sociétés postindustrielles, dénonce le besoin d’artificialité dans un monde où toute réalité plonge inexorablement dans l’absurde et le grotesque. La cohérence de l’univers se déconstruit avec la fin des Grands récits (Lyotard, 1979) et ouvre ainsi l’ère du «bonheur paradoxal» en régime d’hyperconsommation (Lipovetsky, 2006). Les romans de Frédéric Beigbeder, qui se revendique haut et fort être un écrivain de la postmodernité, sont disponibles dans les magasins de grandes surfaces. Aussi n’hésite-t-il pas à qualifier son écriture comme celle d’un «néo-néo-hussard de gauche, d[’un] sous-Blondin aux petits pieds pour cocaïnomanes germanopratins, truffé[e] d’aphorismes lourdingues dont même San-Antonio n’aurait pas voulu dans ses mauvais trimestres». (Beigbeder, 1994: 10) On l’a compris: l’artiste postmoderne, jouisseur du totalitarisme des loisirs, se parodie lui-même; il est ce «bouffon» qui se prend au sérieux à force de mêler un égocentrisme exaspéré à de pseudo-révolutionnaires stupéfiants.

La bibliothèque des Littératures d'Aventures

Vendredi 23 Juillet 2021
Imaginaire et culture pop
Participant·e·s:
Dominguez Leiva, Antonio
Balthazar, Stéphanie
Stefenfeld, Nicolas

Antonio Dominguez Leiva revient avec Stéphanie Balthazar et Nicolas Stefenfeld sur l'histoire de la Bibliothèque des Littératures d'Aventures (BiLA), situé à Beaufays en Belgique, et sa fondation par Jean-Marie Graitson dans les années 1970. À partir de 1987, ce dernier organisa des colloques de paralittérature et fonda, aux éditions du CEFAL, deux collections devenues célèbres: «Les cahiers des paralittératures» et «Paralittérature».

Table ronde des commissaires de «Trans[création]»

Les quatre commissaires de Trans[création] (Livia Benedetti, Gina Cortopassi, Alexandra L Martin et Marcela Vieira) se sont réunies avec Nancy Perloff, commissaire au Getty Research Institute et Dene Grigar, commissaire et fondatrice de The NEXT, pour une table ronde. Animée par Lara Bourdin, elles abordent les diverses pratiques commissariales ainsi que les enjeux technologiques du commissariat en ligne ou d'œuvres hypermédiatiques.

A transcriação da realidade e a fabulação do real em Pedro Costa

À partir de la production du cinéaste portugais contemporain Pedro Costa, Maíra Freitas développe une perspective d'analyse qui considère la fabrication du réel et la transcription de la réalité. L'indiscernabilité entre les régimes documentaire et fictionnel dans le cinéma de Costa est construite à partir de la présentation d'un monde et de personnages simultanément réels et parfaitement irréels.

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