Recherche: Journaux et carnets

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Mourir de sa belle mort

Dufour, Geneviève
Montréal, Boréal, 2005
331 pages.
Le Journal de Marie Uguay, paru en 2005 chez Boréal, offre, comme d’autres avant lui — qu’on pense à ceux d’Hector de Saint-Denys Garneau et d’Hubert Aquin, pour ne nommer que ceux-là —, une proximité peu commune, non pas avec une représentation fabulée de l’auteur, mais bien avec l’auteure réelle  elle-même. Le journal étant une trace contextualisée et temporelle d’une époque, d’une période, les écrits de Marie Uguay ne ressemblent donc pas à ceux des autres écrivains québécois, aussi diaristes (quoiqu’en disent les rumeurs). Marie Uguay ne partage pas le sacré et la préciosité de Garneau, ni la fougue violente, dense et tumultueuse d’Aquin. Il s’agit plus sûrement, dans le cas de Marie Uguay, d’une quête littéraire existentielle mue par des préoccupations esthétiques et sociales: la recherche d’une écriture affranchie de ses aliénations (comme Québécoise, comme femme, comme écrivaine) et d’une poésie prosaïque, élémentaire, qui s’élabore à partir du quotidien tangible, de ses manifestations matérielles. 

Le corps sur la main

St-Laurent, Julie
Paris, Seuil (Déplacements), 2009
217 pages.

Cambouis est le deuxième carnet de travail publié par Emaz. Cet ouvrage collige un ensemble de notes, d’impressions et d’observations: il constitue à la fois un espace d’épanouissement et de survivance. Demander si la poésie a un avenir dans l’époque contemporaine, c’est au moins lui accorder un présent, remarque Emaz, d’où le besoin pour le poète d’un lieu de sécurité qui, même sans arborer de datation précise, pérenniserait le plus fugace. Dans cette perspective, j’aimerais m’attarder à la façon dont l’écriture de Cambouis témoigne d’un parti pris de l’être-au-monde, c’est-à-dire d’un être dont la subjectivité s’affirme ressentie et incarnée.

Entretien avec Mathieu Arsenault

Salon double
Arsenault, Mathieu
L’Académie de la vie littéraire au tournant du 21e siècle

«Ce que j’aime de ce projet, c’est que nous essayons de maintenir délibérément le flottement entre la parodie d’académie et l’institution sérieuse. Si nous essayons de garder le côté mordant des prix, nous effectuons maintenant la sélection avec plus de sérieux qu’au début, car d’une part, nous sentons un réel engouement de la communauté littéraire pour notre entreprise et d’autre part, on y voit également l’occasion de donner une représentation des différentes potentialités de forme et de contenus littéraires propres à notre époque.»

Une littérature qui ne se possède pas

Paquet, Amélie
Réflexions sur le blogue littéraire

Internet offre plusieurs nouvelles possibilités pour la littérature. La plus importante de celles-ci est que la littérature pourrait, grâce à Internet, tenter de s’échapper de l’industrie du livre et ainsi du copyright : «As it now stands, the literary industry depends upon copyright. But not literature.» Acker adopte ici une posture qui s’apparente à celle des pirates informatiques. L’hacktivisme politique existe depuis les premiers réseaux informatiques. Les hackers, qui ne sont pas des crackers, se servent du piratage informatique de manière engagée afin de lutter contre ceux qui veulent contrôler les réseaux. Les hackers militent donc activement pour la libre circulation des idées et des contenus afin de mettre en échec toutes formes de propriétés privées. Ils piratent des œuvres, non pas dans le but de nuire aux artistes, mais parce qu’ils pensent que la libre circulation des produits culturels est plus importante que tout.

 

 

Un journal très utile

Singher, Charles
Montréal, Héliotrope, 2010
190 pages.

Nous sommes dans un moment de relâchement crispé, je parle de la couleur du temps. Constat facile. Lieu commun des lieux communs. Recyclage. C’est pourtant la réflexion qui est provoquée par la lecture d’Une vie inutile de Simon Paquet. Il y a dans ce roman un jeu entre l’humour cynique, la lourdeur intertextuelle –d’un certain postmodernisme– et l’inutile quête du bonheur, la peur généralisée par rapport à l’avenir –d’un certain hypermodernisme. Normand –le protagoniste– est un homme en milieu de vie qui utilise d’infinies références littéraires et culturelles pour commenter son quotidien et qui, somme toute, vit le tragique contemporain de celui pour qui rien ne fonctionne dans une société qui demande que tout soit productif et rempli de bonheur immédiat. Il y a plusieurs éléments en jeu dans ce roman. Le contrat de lecture humoristique qui s’installe dès les premières pages permet une lecture cinglante du moment contemporain nord-américain par le biais du bain hypermoderne qui va bien au-delà du simple misérabilisme crispé qui s’écrit tous les jours. Normand est prisonnier de son «minuscule» demi-sous-sol, au même titre qu’il ne répond pas de son époque. Il illustre et incarne la fin d’une époque. L’échec de Normand ne s’étaie «ni comme le sigle d’un mouvement (qui n’existe pas), ni comme la désignation d’un état d’esprit (trop flottant, trop contradictoire), mais simplement comme le symptôme d’une crise, d’une fin d’époque». Sur le fond, cette fin est caractérisée par la traditionnelle impasse de la quête du bonheur, par son corollaire: l’ennui, par l’urgence d’avoir des «projets» et par le tragique contemporain qui oppose l’individu et les dieux –ici, la doxa.

 

L'Estonie à la première personne

Landry, Pierre-Luc
Paris, Gallimard, 2011
121 pages.

C’est cette Estonie mystérieuse et étonnante que je retrouve dans Eesti. Notes sur l’Estonie de Richard Millet. Ce petit ouvrage se lit comme on écoute l’Aliinale de Pärt: lentement, en respectant les blancs —qui sont d’ailleurs nombreux. Ce carnet ne suit aucun plan: c’est un ensemble de notes sur la langue, le froid, les trottoirs, une suite de réminiscences littéraires et personnelles qui entraînent le lecteur dans une Estonie déformée par les souvenirs de l’enfance libanaise de Millet. Ce que Millet offre à son lecteur, au final, ce n’est pas tant un carnet de voyage qu’un carnet écrit à cause d’un voyage, sous l’impulsion d’un voyage —et qui déborde du cadre strict du récit de voyage, bien sûr. 

Vie éclatée, lectures éclectiques, vie électrocutée. Studio de lecture #1

Fontille, Brigitte
Hivert, Ariane
Lamoureux, Désirée
Landry, Pierre-Luc
L'infini, Paris, Gallimard, 2011
170 pages.

Vie électrique, c’est un «roman à soi», un «roman continu» dans lequel chaque pulsation correspond à une journée, une œuvre littéraire, un auteur qu’on apprécie, un lieu qu’on a aimé. Un drôle de roman, en somme, qui ne ressemble pas du tout à un roman mais qui donne envie d’aller lire ailleurs pour voir si on y est.