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Le temps interrompu

Audet, René

Comment peut-on envisager la narrativité dans l'époque contemporaine ? Si je propose de la considérer dans son lien intrinsèque avec l'événement,  il m'importe d'abord de la situer dans son rapport avec l'historicité. À cet effet, deux prémisses sont nécessaires afin de placer la situation du contemporain dans une perspective historique et d'établir le cadre dans lequel nous nous situons.

Prolégomènes terminologiques

Gervais, Bertrand
Réflexions sur le contemporain I

Le terme «contemporain» est d’une grande malléabilité, et il convient de l’étudier dans ses utilisations non seulement historiques, mais phénoménologiques et langagières. Le terme est tout aussi élastique dans sa portée que peut l’être le temps dans l’expérience subjective que nous pouvons en faire et, au-delà de l’assertion préliminaire que le contemporain, c’est le présent, sa véritable portée est soumise à de multiples torsions et interprétations. Pour bien en comprendre la signification du terme, commençons par le plus simple, c’est-à-dire par une brève exploration de ses usages langagiers. Les réflexions qui suivront exploreront d’autres aspects de la question, que ce soit le rapport au temps et au présentisme qui caractérise notre époque, la distance critique requise pour rendre compte du contemporain, ses manifestations culturelles et médiatiques, etc.

 

Le contemporain et l'actuel

Gervais, Bertrand
Réflexions sur le contemporain II

Si le contemporain est ce qui résiste à son temps, comment rendre compte de l’imaginaire contemporain, qui serait donc l’imaginaire de ce qui résiste à sa propre actualité? Appliquée à l’imaginaire, une telle conception du contemporain semble impliquer une régression à l’infini.
En fait, il convient d’examiner de plus près la posture d’Agamben, car elle consiste essentiellement à définir une figure, et non à étudier un imaginaire. Et cette figure qu’il décrit, c’est celle d’un intellectuel, de ce sujet qui, identifié comme Sujet Contemporain, est capable de comprendre son siècle et d’en prendre la mesure.

L’écume du contemporain

Gervais, Bertrand
Réflexions sur le contemporain III

Notre relation au temps est faite d’une négociation complexe, où ce que l’on gagne d’un côté, on le perd systématiquement de l’autre. Parfois, le passé semble se faire de plus en plus lointain, et c’est le futur qui pousse de tout son poids sur le présent, orientant son développement. Les progrès technologiques nous incitent à rêver de jours meilleurs, où tout sera résolu, même s’il y a là une utopie, un leurre dangereux. À d’autres moments, c’est le passé qui paraît s’éterniser et qui ne desserre pas ses griffes sur le présent, neutralisant le futur et l’éloignant comme une aube impossible à rejoindre. La tradition fige les institutions et projette un monde qui ne parvient plus à se renouveler. Il arrive aussi que le passé et l’avenir pressent fortement sur le présent, ou alors se font tous les deux distants et inaccessibles, et le présent entre dans une crise, où tout paraît boulonné, où les horizons d’attente se disloquent. Ce ne sont jamais que des perceptions, fondées sur ces rapports imaginaires que nous entretenons avec le réel, mais elles teintent la conception de notre propre temps. 

Seul contre tous

Hébert, Sophie
Paris, Gallimard, 2008
175 pages.

Les essais de Richard Millet, du Dernier écrivain (2005) au Désenchantement de la littérature (2007), semblent, depuis quelques années, se fermer à toute entreprise herméneutique, en développant une posture auctoriale particulièrement complexe. L'Opprobre (2008), son dernier livre, confirme cette tendance. Désir honnête et scrupuleux de restituer à son lecteur les grossièretés critiques qui ont accompagné son dernier texte? Ou plaisir malsain de ressasser en ricanant ce qui a définitivement fâché? Les premières pages de L'Opprobre dressent la liste, longue et laborieuse, mais finalement —n'est-ce pas aussi ce que cette énumération suggère?— éminemment consensuelle, des qualificatifs qu'une certaine critique littéraire a cru bon d'attribuer à l'auteur du Désenchantement de la littérature. Avec L'Opprobre, Millet s'arroge donc le droit légitime de répondre à ses contempteurs qui, pour l'occasion, deviennent, dans son imaginaire profondément empreint de manichéisme, des «ennemis» à abattre, des «agents du Démon» à neutraliser dans des phrases assassines. 

Regards littéraires sur une crise du temps

Brousseau, Simon
Intertextes et présentisme

Il ne me semble pas irréaliste de croire que cette crise du temps diagnostiquée par de nombreux penseurs se reflète dans la production littéraire contemporaine. L’importance des écritures autofictionnelles dans les dernières années, par exemple, pourrait être interrogée à l’aune de ce constat. Cependant, d’autres pratiques littéraires fragilisent l’équation. Je souhaite ici proposer une mise à l’épreuve de l’idée du présentisme contemporain par le biais d’une réflexion sur l’intertextualité. Le texte Le mal de Montano (2002) d’Enrique Vila-Matas, qui se construit en multipliant les références aux œuvres littéraires qui le précèdent, me permettra de questionner les rapports au temps qu’une écriture intertextuelle peut développer. J’interpréterai le regard sur le monde contemporain qui est véhiculé dans ce texte, pour ensuite interroger la signification d’une des idées centrales dans celui-ci, soit la nécessité pour le narrateur de lutter contre la mort de la littérature. Nous verrons que cette lutte entraîne un rapport particulier au temps. J’aborderai aussi la représentation dans ce texte de deux événements contemporains majeurs, soit le passage dans le XXIe siècle et les attentats du 11 septembre 2001, qui peuvent être considérés, à la suite de la chute du mur de Berlin, comme étant des moments phares dans la précarisation de notre rapport au temps 

 

Fin d'une ère et début de jeu

Tremblay-Gaudette, Gabriel
Toronto, Anansi, 2010
246 pages.










Oublions un instant les scénarios extrêmement improbables, comme une invasion de zombies, une guerre intersidérale, ou une rébellion de robots-tueurs. Peut-on penser à une plausible amorce de fin du monde, dont l’humain serait directement responsable? Le mode de vie occidental actuel et le nombre élevé d’habitants sur la planète pourraient-ils provoquer des circonstances menant au déclenchement du dernier acte de la comédie humaine humaine? Certes, les bonzes d’Hollywood s’évertuent à nous proposer sur grand écran des visions de telles catastrophes, mais ceci n’est que prétexte à enchaîner les séquences spectaculaires d’effets spéciaux. Toutefois, dans le domaine de la littérature, dont le terrain de jeu se situe habituellement davantage au plan de l’intériorité psychologique que dans le fla fla tonitruant, l’imaginaire de la fin est un moment fort de remise en question et de l’introspection collective: le désastre y est source de réflexions, et non de pyrotechnies. 









Ces poussières faites pour troubler l'oeil

Brousseau, Simon
New York/Boston/London, Back Bay Books, Little, Brown and Company, 1996
1079 pages.
Un roman de l’envergure d’Infinite Jest repose sur le projet de s’opposer à la facilité de l’art divertissant, tant par sa structure narrative complexe et par les thèmes qui y sont abordés que par l’engagement que sa lecture implique. Le nombre d’heures nécessaires à la lecture de cette brique agit de façon décisive sur le lecteur, l’exposant longuement à la tristesse du sujet contemporain qui apparaît, au fil du texte, être l’un des fils reliant entre eux les nombreux personnages de l’histoire. C’est pourquoi il me semble pertinent d’aborder ici ce roman qui, bien qu’ayant été publié il y a quinze ans, demeure d’une actualité criante, tant par la réflexion qu’il propose sur la culture contemporaine que par le regard critique qu’il porte sur l’écriture de fiction.

Les gros bras du conteur

Grenier, Daniel
New York, Little, Brown and Company, 2010
729 pages.

The Four Fingers of Death, le très massif roman de l’américain Rick Moody, auteur de The Ice Storm et The Black Veil, est assez facile à résumer. Dans une longue introduction rédigée en 2026, le narrateur, un écrivain qui se qualifie d’ultra-minimalisteappelé Montese Crandall explique comment il en est venu à être l’auteur de la novélisation de The Four Fingers of Death, la nouvelle version du film culte de 1963 The Crawling Hand. La suite du roman de Moody est la novélisation en tant que telle, divisée en deux parties (Book I et Book II), écrites de la plume de Crandall; la première racontant, sous forme d’entrées de journal/blogue, les mésaventures d’une équipe d’astronautes durant le voyage interplanétaire de plusieurs mois qu’ils doivent faire pour se rendre sur Mars; la seconde décrivant en détails les conséquences effroyables de cette première mission humaine de la NASA en vue de l’exploitation et de la colonisation de la planète rouge. À la page 702, après avoir inscrit les mots THE END, Montese Crandall revient au premier plan, le temps d’une courte postface qui clôt le livre. Bien entendu, on pourrait complexifier infiniment ce résumé bêtement structurel en ajoutant des détails sur ce qui se déroule à l’intérieur de chacune des parties. C’est probablement ce que Moody aurait voulu, le roman s’inscrivant résolument, et dès les premières lignes, dans une esthétique de la surenchère, alors allons-y.

Dans le « vestibule de l'enfer »

Auger, Manon
Landry, Pierre-Luc

Dans ce recueil de réflexions au titre saisissant, Richard Millet tente de livrer une définition du «cauchemar contemporain nommé roman». Voilà bien une entreprise pour le moins complexe et téméraire, si on en juge par la position privilégiée qu’occupe la littérature narrative en régime contemporain. Mais c’est justement là, on le devine, l’intérêt du propos de Millet. Il serait facile de s’en prendre à l’écrivain (qui revendique pleinement toutes les opinions exprimées dans le recueil) et de dénoncer son hypocrisie de romancier ou son eurocentrisme —pour ne pas dire son gallocentrisme. Néanmoins, cette utilisation à des fins polémiques des réflexions de Millet n’est pas celle qui nous a semblé d’emblée la plus féconde, même si cet essai y invite indubitablement. Nous avons plutôt préféré aller au-delà des «montées de lait» occasionnelles, afin de faire émerger la réflexion plus fondamentale qui est au cœur de la démarche de l’écrivain. Car notre ambition n’est pas de rendre Millet sympathique ou antipathique, mais bien plutôt de dégager les grands éléments de sa pensée par rapport à cette notion de postlittérature, notion qui nous paraît, sinon opératoire, du moins intéressante pour penser la production littéraire actuelle, qu’elle soit française, québécoise ou —pour reprendre un terme maintes fois utilisé par Millet lui-même— «internationale».