arts visuels

Le syndrome de Stockholm. Daniel Clowes et l'équivocité

Lire une des bandes dessinées de Clowes est un peu comme jouer au jeu du bunto (également appelé jeu des gobelets): on sait que l’objet est bel et bien caché sous l’un des trois contenants, mais on sait aussi que la personne qui s’occupe de les brasser est très habile, et que si d’aventure on parvenait à le trouver, ce serait peut-être seulement parce que la personne qui permute les gobelets à une vitesse sidérante nous a laissé gagner, afin de nous inciter à jouer à nouveau. C’est une manipulation de haute voltige, à laquelle nous donnons notre assentiment même si l’on se doute bien que les dés sont pipés.

Daniel Clowes. La ligne autoréflexive

Loin d’être une simple suite d’effets esthétiques, l’hétérogénéité graphique dans «Ice Haven» interroge en profondeur le support et plus précisément les possibilités de narration de la bande dessinée. Clowes fait reposer la narration de son album sur deux procédés narratifs différents: il allie l’économie du «strip» de presse aux possibilités de développement qu’offre l’absence de format arrêté du roman graphique. Le format horizontal et la référence au «strip» de presse, qui entrent en rupture avec une bonne part du corpus de l’auteur —qu’il interroge volontairement ou involontairement la généalogie du neuvième art— renvoient inévitablement à tout un pan de l’histoire de la bande dessinée américaine, à une narration qui se construit sur une logique d’efficacité: l’espace réduit, longtemps réservé aux «strips» quotidiens des journaux, comme le nombre de vignettes et la quantité restreinte de texte devaient à la fois faire avancer l’histoire, développer intrigue et personnages, tenir le lecteur en haleine jusqu’au lendemain et garder une certaine indépendance.

Un monde fantôme

Du monde fantôme au médium d’apparition et à la case spectrale, du brouillard de la mémoire à l’élément graphique-souvenir, des images du monde flottant à l’écoulement d’images, du «hanteur sous la pluie» au «eavesdropper», ces différents concepts s’enchaînent, tressent un réseau de sens pour tenter de définir un médium dont l’impalpable définition semble justement toujours résider dans l’entre-deux, au propre comme au figuré.
N° de la publication:
2
2021
Qu’est-ce que la littérature ? Qu’est-ce que le cinéma ? L’acte de création est-il séparable du média — à la fois au sens de technique, de langage et de milieu — qui le porte ?

L’encre sur le silence. Les objets de la mémoire et les images de l’oubli dans «Heimat, loin de mon pays» et «L’amour ferme les yeux»

Si, comme le dit Lukács, toute forme artistique est la résolution d’une «dissonance existentielle» que l’artiste tente d’exorciser dans l’acte créateur, écrire sur l’Holocauste est un véritable défi à l’irreprésentable qui –pour être mis en œuvre– a besoin d’une forme qui utilise tous les langages capables d’investiguer le spectre implacable d’un traumatisme qui n’a jamais cessé d’agir sur notre présent et qui continue de faire partie des thèmes abordés par la littérature, en particulier dans le cas des littératures dessinées.

Habiter et être habité·e·s dans les lieux confinés

Sara Bédard-Goulet s’inspire de l’installation vidéo The House (2002) d’Eija-Liisa Ahtila pour développer une réflexion théorique sur l’habiter dans les lieux confinés, permettant, suivant la psychose comme modèle, d’être habité·e·s par le monde, dans une forme d’écocosmopolitisme et d’individuation relationnelle qui s’oppose à un modèle frontalier ou membranaire souvent associés à ces lieux.

Voyages quantiques sur le Web: trauma et reterritorialisation dans l'oeuvre afro-diasporique «Blackwomxntemporal.net»

Gina Cortopassi présente une version abrégée de son plus récent chapitre de thèse ainsi qu'un préambule posant les bases de sa réfléxion et de son hypothèse de recherche. Se spécialisant dans l'analyse d'oeuvres d'art hypermédiatiques, c'est-à-dire «des oeuvres d'art créées pour et avec les outils du web», la thèse de la participante se concentre sur la notion de reterritorialisation dans trois oeuvres non-occidentales en Amérique du Nord dont Blackwomxntemporal.net, du collectif afro-américain Black Quantum Futurism, qu'elle nous présente aujourd'hui.

Quelques mots sur la professionnalisation artistique

«S'ils devaient encourager la prise de risque et l'expérimentation, les centres d'artistes autogérés sont devenus de dociles petits musées asujettis à la course aux subventions et à leurs exigences de rentabilité. L'historienne de l'art Anne-Marie Bouchard observe l'échec de la critique institutionnelle intégrée à même le discours muséal, observable entre autres par l'inclusion de pratiques artistiques et curatoriales qui critiquent ouvertement les institutions dans lesquelles elles évoluent.



L’Afrique en circulation: figures, discours, pratiques

Animée par le poète Rodney Saint-Éloi, cette table ronde réunit Sarah Davies Cordova, traductrice du livre Mère à mère de Sindiwe Magona, Alain Serge Agnessan, chercheur et poète, Dan O'Meara, politicologue et militant anti-Apartheid, Isaac Bazié, professeur au département d'études littéraires de l'Université du Québec à Montréal, et Janny Montinat, étudiante, autour du thème de la circulation.

«Ce livre d'images [...] a l'âge que vous voulez avoir»: détournement de l'album pour enfants dans «Le Cœur de Pic» de Lise Deharme et Claude Cahun

«Volonté d'innovation artistique, esprit de collaboration, ludisme: telles sont les principales caractéristiques du livre dit surréaliste qui permettent d'en circonscrire l'étendue malgré le flou qui entoure sa définition. Le recours quasi-systématique aux activités ludiques comme moteur de création contribue à extirper le livre surréaliste des limites imposées par la raison, ce qui permet ultimement et entre autres de nombreux bouleversements dont ceux entre les arts, entre les genres sexuels et entre les genres littéraires au sein même d'une oeuvre.

S'abonner à RSS - arts visuels