Quelles recettes pour oublier dans un monde d’informatique omniprésente ?

(Source: Hubert Guillaud dans InternetActu.net)

Viktor Mayer-Schönberger, professeur de droit public à l’université d’Harvard, s’inquiète de la capacité de mémoire de notre environnement. “Comme l’Etat soviétique, Google n’oublie rien”, explique avec provocation le professeur. Dans un récent article il note que l’expansion de la capacité de stockage de l’informatique induit que de plus en plus d’éléments de nos vies vont être enregistrés et sauvegardés. Cela va profondément influencer notre manière de voir le monde et notre comportement. Que se passe-t-il si ce que nous faisons peut-être utilisé contre nous des années plus tard, si tous nos commentaires impulsifs sont préservés ? L’absence d’oubli peut nous conduire à une société où nous parlerons moins librement et moins ouvertement…

Mayer-Schönberger propose une solution : que la mémoire de nos machines et logiciels se contraigne à fonctionner comme elle l’a fait depuis des millénaires, et que l’on repasse du souvenir perpétuel à l’oubli avec le temps. La loi devrait prévoir, pour différent types d’outils ou de logiciels, des durées après lesquelles l’information doit disparaître : quelques jours ou quelques semaines pour les caméras de surveillance, peut-être quelques années pour l’enregistrement de nos achats chez Amazon (après tout, nos préférences littéraires doivent-elles être constantes pour l’éternité ? Comment continuer à les faire évoluer d’ailleurs, si les systèmes continuent de prendre en compte le poids des données passées ?). Les utilisateurs devraient même pouvoir changer eux-même la date d’expiration des données qu’ils conservent ou laissent conserver par d’autres, même si par défaut, l’oubli devrait être la norme.

Le but de Mayer-Schönberger : réduire la masse de données que gouvernements et entreprises savent collecter sur les utilisateurs et citoyens, simplement parce qu’ils le peuvent. Mettre une date d’expiration par défaut forcera ces organisations à s’interroger pour savoir si elles ont vraiment besoin d’engranger ces données pour toujours. Nous aussi.