Pensée fantôme

Soumis par NT2 le jeu, 04/19/2007 - 16:49

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Cette oeuvre créée dans le cadre de l'Atelier de création hypertexte du XIème festival international de la vidéo et des arts électroniques (26 mars 1996 - 13 avril 1996) est la version hypertextuelle d'un texte philosophique. L'auteur réfléchit sur la notion de pensée. Anciennement hébergée au http://archives.cicv.fr//HYP/ucc.html, l'oeuvre se retrouve maintenant sur Internet Archive.

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Citation(s)

Le héros de James Ellroy entre dans un bar. Il s'arrête devant la tentation, toute littéraire, de le décrire: "c'était un boui-boui à bière avec enseigne au néon affichant les heures d'ouverture: 6 heures le matin à 12 heures le matin, le maximum autorisé par la loi. En entrant, je fus frappé par un millier de déjà vu". Il y a dans ce déjà-vu de l'étonnement. Le héros entre dans un endroit qu'il n'a jamais vu; son mandataire lui a décrit les habitués du bar. Ce n'est pas tant la précision de la description qui trouve ici sa pertinence, mais elle éclaire d'un jour nouveau ce qu'il avait longuement cotoyé sans jamais l'avoir nommé: "Au cours des années, j'avais vu des dizaines d'hommes habillés de la même manière, le teint brûlé de soleil, entre deux âges, vêtus de façon trop voyante pour être des clodos, et n'ayant malgré tout pas l'air de citoyens normaux". Ce déjà-vu, qu'Ellroy rend en français dans le texte fonctionne comme un éclaircissement après coup. Il y aurait déjà vu quand une réalité ou une situation déjà cotoyée mais non nommée, trouve nom. Nous retrouvons ici le principe dit de Monsieur Jourdain découvrant qu'il faisait de la prose, avec cette différence néanmoins que c'est une ponctualité qui prend nom et non pas une logique. De ceci le déjà-vu n'est que désignation de singularité. En même temps qu'il échappe à ce qui serait une généralité ou une globalité, il se distingue du souvenir. Ce dernier, étant ma chose, a toujours nom. La population du bar est certes mémorisée mais, comme ça, en attente. Elle fait partie de ces choses qu'on réserve, dont on ne prend pas le temps d'aller voir le nom, qui subsistent comme des éléments précis dans la vision, flous à la restitution. Si flous, que la description qu'on peut m'en faire ne les rappelle pas. Ce n'est de même qu'après coup qu'elle prend sa saveur. Pour le reste ne s'articulant qu'en mot elle glisse sur la réalité qu'elle dit.

Discours (notes)

«La pensée tient sur un impensable: pour qu'elle soit il lui faut être limitée. On peut même dire que l'histoire de la philosophie est l'histoire des efforts faits en vue de cette limite. Or si penser c'est toujours penser dans le limité, demeure la présence immense, non recensée, non recensable, puisque non pensable de l'illimité. Un texte, celui présenté à titre d'exemple, mais ne peut-on pas dire tout texte, tient de ces deux registres, ce qu'il dit et ce qu'il ne peut faire qu'occulter. C'est de cela que joue la pensée, c'est de cela que tient la littérature. L'impensé, l'impensable c'est le multiple, l'effort des philosophes pour le circonscrire, n'empêche qu'il affleure sans cesse comme la part maudite de la pensée...»

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Répertoire

Pensée fantôme

Ucciani, Louis