Présentation de la communication
«Dès l’après-guerre, un important changement de paradigme s’opère dans la façon dont la littérature conçoit le voyage. On ne lit donc plus seulement les récits de voyage des grands auteurs, mais aussi des romans dans lesquels des Français moyens courent le monde. Les vacances ne se limitent plus, dans les œuvres des poètes et des cinéastes et des essayistes aux villégiatures en maison secondaire campagnarde ou à bord d’un bateau de croisière princier, mais comprennent désormais les séjours dans les campings sociaux, les hôtels de deux étoiles confort, les villages vacances famille et les stations balnéaires bon marché qui pullulent en France et ailleurs. Les représentations des estivants, des festivaliers et autres vacanciers, faites par ceux qui les accueillent avec bienveillance ou non, foisonnent dans la production artistique et littéraire des années 1950 et 1980.
Ce qui surprend un peu, du moins pour une néophyte comme moi, c’est le grand nombre d’œuvres rassemblées – parfois à tort – sous la bannière du nouveau roman. Qu’il représente le tourisme de masse, qu’il fasse l’objet de scènes importantes ou qu’il apparaisse au détour d’une description dans une comparaison ou une métaphore. C’est le cas, notamment, de L’été indien de Claude Ollier, de Dix heures et demie du soir en été de Marguerite Duras ou de ses Petits Chevaux de Tarquinia, de L’observatoire de Cannes de Jean Ricardou, du Livre des fuites: un roman d’aventure de Le Clézio, de Six million huit cent dix mille litres d'eau par seconde de Butor et de Topologie d'une cité fantôme de Robbe-Grillet. Si le tourisme de masse se rencontre aussi souvent dans l’art et la littérature, c’est qu’il occupe de plus en plus de place dans la société française. Avec le second après-guerre naît une nouvelle phase du développement industriel, laquelle induit le passage d’un tourisme d’élite à un tourisme de masse.»