À l’extrémité est du quartier Hochelaga-Maisonneuve à Montréal, on trouve un immense terrain vague auquel les jeunes du quartier réfèrent comme étant le «wasteland». Bien qu’il soit illégal d’y mettre les pieds, plusieurs usagers y pénètrent quotidiennement afin d’en habiter l’espace. Ce terrain vague n’est pas tout à fait un lieu, défini par un sens identitaire, relationnel ou historique précis, mais ne pourrait cependant être perçu comme étant simplement un non-lieu – espace strictement utilitaire et interchangeable qui ne se construit pas autour d’un univers de significations distinctes. Il serait plutôt un espace intermédiaire dont la nature floue appelle à l’invention de nouveaux modes d’habitabilité. L’usage des espaces urbains étant de plus en plus réglementé et étant souvent limité par une logique de consommation\production, le terrain vague offre un espace où certaines pratiques marginalisées peuvent exister au cœur de la ville. Il fait alors figure d’«ailleurs» ou d’espace résistant. Ces pratiques marginalisées, qu’elles soient festives, ludiques ou artistiques, donnent naissance à des interstices sociaux: des «communautés d’échanges échappant au cadre de l’économie capitaliste» que l’on pourrait aussi qualifier de zones autonomes temporaires (Hakim Bey). Elles permettent l’émergence de plusieurs formes de pensées et d’expérimentations utopiques qui, bien que n’ayant pas un effet direct sur le reste de la communauté urbaine, peuvent y créer des résonnances.
OBSERVATOIRE DE L'IMAGINAIRE CONTEMPORAIN