Nos pas enfoncent l’hiver dans le sol
Errance hivernale post-temps-des-fêtes
les vidanges pleines de souvenirs
9 h 52 – parc Préfontaine. Début de l’exercice.
Je suis assis sur un banc de parc. J’écris sur des feuilles de cartables en me servant d’un album de Boule et Bill comme tablette.
Tout se déroule comme si le quartier était un texte s'écrivant sans cesse avec la voix, les gestes, bonheurs et souffrances de ses habitants. Habiter comme on écrit. Les murs craquent déjà de mots à partager.
La date: 3 novembre 2014 (un lundi, 40 ans plus tard)
L'heure: 10h45
Le lieu: Place Simon-Valois
Le temps: frais, très frais, partiellement nuageux
Passage d'un balai mécanique
Elle disait : la côte Sherbrooke. Elle disait : qu’on soit à l’est, qu’on soit à l’ouest, pour passer au nord, il faut toujours monter la côte qui mène à la rue Sherbrooke. Passage obligé.
Marcher vite pour ne pas que l’hiver me rattrape, les bouts de doigts gelés ne doivent pas se perdre dans le canal bouché par un sac de vidanges éventré. J’ai peur de la suite des choses, mais je continue d’avancer, quitte à tomber en cours de route. C’est inévitable, je suis maintenant, trop engagée dans la marche du quartier pour faire demi-tour.
À neuf heures et quart du matin y a pas grand monde sur le quai de Berri en direction d’Honoré-Beaugrand, en face, il y a des étudiants, des messieurs-dames en costumes bien lisses, des capuches et des mitaines, dans la rame, j’ai de la place confort pour débarquer chez toi, Hochelaga.
Improvisation musicale sur un extrait de «Mille regretz», de Gabrielle Giasson-Dulude.
je partais à la recherche de mots inscrits sur des murs.
ce quartier, c'est le tien, tu l'habites jusqu'en vandale.
J’emprunte le trajet habituel – celui qui mène à la station Joliette, à sa ruelle et toutes celles qu’il est possible d’emprunter jusqu’à la rue Adam. C’est comme passer par la porte d’en arrière, quand t’es kid, après avoir passé tout le jour à jouer dans les herbes hautes, le gravier puis la boue. Mais tu cherches encore la porte qui te permettra d’aller voir à l’intérieur d’Hochelaga.
Il y a au moins un million cent soixante et onze mille trois cent cinquante-cinq personnes qui te traverse, ô Parc Préfontaine, pour entrer dans tes profondeurs par la bouche chaude de ta station et de ton édicule futuriste d’un autre temps.