Fleurs et fusil, Marjolaine Deschênes (2013)
Sans frontière, éclairant l’horizon de son phare, La Peuplade a pour mission de peupler le territoire de littératures actuelles, tant dans le domaine de la poésie que du roman. La maison d’édition est établie à Chicoutimi depuis près d’une décennie et Mylène Bouchard, son éditrice, continue d’innover et d’occuper de nouveaux territoires. Entre 2013 et 2014, la maison d’édition ne s’est d’ailleurs pas limitée au format papier: on retrouve en effet sur leur site Internet six «livres vus», réalisés par Nicolas Lévesque et Sophie Gagnon-Bergeron. Il s’agit de courts-métrages librement inspirés d'œuvres publiées à La Peuplade, soit, Fleurs et fusil, 47 atelier des saveurs, Le soleil du lac qui se couche, Le fil des kilomètres, Salut Loup! et Chez la reine. Chaque livre vu se décrit comme un tableau cinématographique : «qu’il soit documentaire, atmosphérique ou expérimental, [il] s’inspire du climat du livre traité, respecte son esprit et en intègre un passage» (La Peuplade)
Chez la reine, Alexandre Mc Cabe (2014)
Mises à part de rares exceptions (on pense entre autres au Supplément à la vie de Barbara Loden de Nathalie Léger, inspiré du film Wanda), l’adaptation cinématographique suit généralement la publication d’un livre, le film devenant à la fois signe et cause d’un certain succès littéraire. Ce qu’a proposé La Peuplade est d’un tout autre ordre: la caméra de Nicolas Lévesque se fait impressionniste, elle saisit en très peu d’images (les films durent entre 1:45 et 3:14 minutes) un bref instant qui suggère, plus qu’il ne résume, le texte imprimé. Ces courts-métrages se veulent en eux-mêmes des œuvres autonomes, «des tableaux vivants, qui au lieu que de n’être que des teasers publicitaires, sont plutôt de véritables œuvres cinématographiques en soi», comme l’écrivait Isabelle Beaulieu dans Le libraire. Ce n’est plus la littérature qui se fait le miroir du monde à la manière de Stendhal, qui prétend «peindre» un monde, une époque, mais plutôt l’image, par le biais du regard photographique de Sophie Gagnon-Bergeron, qui rend l’écrit vivant. Par la synesthésie du geste, le projet des livres vus transpose sur le support numérique l’opération que chaque lecteur effectue par l’imaginaire. Bien sûr, le cinéaste impose sa subjectivité, mais avec une délicatesse, presque une poésie, qui confère à ces «tableaux» une indépendance perdurant une fois le livre publié, lu, oublié peut-être. La Peuplade, éclairée par son phare, profite ainsi de l’espace vaste et infini sur Internet afin de poursuivre sa recherche de nouveaux territoires à peupler.
La Peuplade poursuit actuellement un dialogue entre l’art et la littérature avec son artiste en résidence Julie Espinasse: elle créera les couvertures des livres pour l’année à venir. On peut écouter les «livres vus» au: http://lapeuplade.com/livres-vus/