Soumis par NT2 le
F8MW9 est une oeuvre alliant poésie sonore, interface numérique et enregistrement vocal remanié. La poète Margareta Waterman a fourni à l'artiste hypermédiatique Jim Andrews deux enregistrements vocaux de poèmes (formés de mots inventés dont la texture sonore est la première et principale qualité) ainsi que cinq gribouillis. Andrews a ensuite constitué une interface interactive permettant une recomposition combinatoire et aléatoire de très brefs extraits d'enregistrements de la voix de Waterman. La révélation progressive et saccadée de l'enregistrement et des dessins de l'artiste, l'attente de l'émergence d'un sens au terme de cette découverte graduelle et l'éventuel constat que dessin et son ne peuvent s'interpréter que comme des productions abstraites fondent la poéticité de cette oeuvre.
L'interface est divisée en trois sections de tailles très diverses. Celle du haut, occupant le plus grand espace, est initialement composée d'un carré gris, qui dévoile peu à peu des portions d'un dessin de Waterman. La deuxième section présente la bande sonore de l'enregistrement du poème de Waterman, par le biais d'un sonagramme. Un curseur vertical défile simultanément sur les deux sections, indiquant la portion de l'enregistrement diffusée et dévoilant progressivement le dessin de Waterman. Une dernière section au bas de l'interface permet de contrôler certains paramètres de l'expérience hypermédiatique. Le premier permet d'ajuster, à la milliseconde près, la durée de l'extrait entendu. Le deuxième, représenté par le signe mathématique infini, permet d'entendre intégralement la piste sonore. Le troisième, un rectangle avec une flèche à sa droite, permet de faire alterner le dessin de Waterman présenté dans la section du haut de l'interface. Le quatrième, un rectangle avec un X à l'intérieur, permet de remettre la section du haut de l'interface à son état initial (recouvert de gris). Le cinquième permet d'ajuster le volume de diffusion du son. Le sixième, une flèche oscillante, permet de passer d'une trame d'enregistrement à une autre.
La poésie de cette oeuvre ne tient pas dans son texte, que la navigation par défaut rend inintelligible (ne jouant que des extraits très brefs dans un ordre aléatoire) et que l'écoute continue révèle être non-langagière. C'est donc un matériau sonore qu'il faut considérer dans l'expérience de l'oeuvre, en appréciant la scansion, la tonalité et l'émotion que Waterman parvient à transmettre par le biais d'une performance orale ne reposant pas sur l'usage de mots appartenant à une langue connue. De même, l'écoute des extraits sonores s'accouple à un dévoilement progressif d'une image qui, elle non plus, ne produit pas de signification graphique - elle n'en vient pas à révéler des formes associables à des objets. La qualité abstraite du dessin va donc de paire avec une performance orale ne produisant pas un message concrètement inteprétable. C'est le processus de dévoilement progressif, de projection de la comphérension sur une surface se révélant peu à peu à notre regard, et bien sûr l'échec de nos attentes de compréhension, qui sont aménagés grâce à l'interface d'Andrews, au niveau de motif et moteur de l'oeuvre.