Le 9 février 2013, j’ai eu le grand plaisir d’effectuer une expérience artistique à l’Université Queen’s à Kingston, dans le cadre du THATCamp 2013: la création d’un ‘Paper Twitter’. À partir des cartes de recettes vides, des crayons, des ficelles, et du ruban, les participants (une vingtaine d’étudiants des cycles supérieurs en lettres) ont créé un réseau social en papier.
En faisant cette expérience, j’ai eu l’intention de démontrer que beaucoup des conventions que nous voyons sur les réseaux sociaux sur support numérique sont en réalité des conventions communes à toute communication qui passe par l’écrit. Les réponses à des messages précis, de nouvelles discussions qui émergent des discussions antécédentes, la cohabitation de plusieurs registres et de styles, et le contact entre le mot et l’image figurent parmi les caractéristiques que je voulais souligner.
Pour cet article, je me limite à une présentation des règles du jeu tel que présenté à Kingston, et une brève discussion de la notion de machine à tweets. Dans les trois articles qui vont suivre dans les deux prochaines semaines, nous allons parler de nourrir et de lire ce que je nomme ‘la Machine à Tweets’, et finalement d’explorer les point de contacts entre le en- et hors-ligne qu’elle suggère.
1. Les règles à Kingston.
Il n’y en avait que 2 : a) de se restreindre à un côté de carte pour chaque message (pour que le tout soit lisible), et b) de ne pas parler.
2. Conventions qui en ont surgi.
a) Après une vingtaine de minutes, j’ai permis aux participants de s’entreparler, mais personne ne l’a fait – nous pouvons donc constater qu’une fois que la discussion est démarrée à l’écrit, elle passe difficilement à l’oral sans autre changement de contexte (changer de salle/d’activité). Nous pouvons aussi savoir que les messages affichés par les participants, bien qu’ils démontrent une certaine perméabilité à l’oralité, sont issus de la tradition écrite (la présence d’images soutient ce point de vue).
b) Bien qu’il y ait un message qui a fait l’objet d’une tentative de censure (une participante l’a couvert d’une autre carte qui disait ‘Censored’), aucun message n’a été arraché du mur. Nous avons tous vu quelqu’un enlever une affiche qui lui a déplu, mais cela est impossible sur Twitter, par exemple, d’enlever le message de quelqu’un d’autre. Est-ce que c’est significatif?
c) Les participants se sont restreints à un seul mur dans l’espace, jusqu’à ce que j’aie affiché un message de l’autre côté de la salle et l’ait connecté au réseau par une ficelle : une fois que je l’ai fait, plusieurs autres participants ont colonisé librement les autres murs de leurs idées. Comment est-ce que nous visualisons l’espace qui nous est réservé pour la communication? Est-ce différent entre l’hors- et l’en-ligne?
Qu’est-ce que la Machine à Tweets?
Alors, pour y répondre, on se demande qu’est-ce qu’un Tweet? Est-ce simplement un message affiché sur twitter.com, ou est-ce qu’il a un sens plus large? Un Tweet, c’est un texte (dans le sens d’un message SMS) destiné à être lu par plusieurs personnes. Est-ce qu’il faut Twitter pour avoir un Tweet? Ou bien, un Tweet, sans Twitter, c’est quoi? Il y a beaucoup de résonances entre le graffiti, le marginalia, et les bulletins publics et le Tweet – est-ce qu’alors un Tweet n’est qu’une nouvelle médiatisation d’un ancien genre?
La Machine à Tweets, c’est ce qui génère ce message. Twitter ne génère rien – il transmet. La Machine, alors, c’est dans sa tête. Et alors, elle peut faire quoi d’autre, cette Machine. Dans les prochains jours, je vous inviterai à y penser, muni de quelques citations académiques et théoriques.
Bonjour Marc,
Merci d’avoir partagé avec nous ton expérience artistique. Je trouve très intéressante cette idée de “La machine à Tweets.” Est-ce que Twitter facilite l’apprentissage interactif? Je trouve que même si l’apprentissage ne se passe de façon traditionnelle, Twitter révolutionne l’enseignement et l’apprentissage. Bonne continuation,
Luis
Bonjour Luis!
Effectivement, il y a des possibilités d’enseignement sur Twitter, mais je dirais que c’est plutôt parce que le site facilite la transmission de liens à d’autres textes (il y a très peu qu’on peut enseigner en 140 caractères ou moins). Twitter, avant tout, c’est un réseau, ce qui fait que les utilisateurs puissent se mettre en contact afin de partager des informations intéressantes- bien que la plupart de cette instruction se fera à partir des textes plus longues hébergés ailleurs sur le web.