
L’idée de circulation fait partie intégrante de l’œuvre hypermédiatique et cette œuvre en réseau, basée sur l’échange, le dialogue et le partage d’informations, s’inscrit totalement dans la tradition épistolaire, terme qui étymologiquement signifie, rappelons-le, faire circuler, envoyer quelque chose à quelqu’un. Au sein de l’œuvre hypermédiatique, la notion même d’écriture est élargie, intégrant des stratégies narratives empruntées à la vidéographie, au cinéma, à la photographie mais aussi aux modes de communication orale comme la conversation et le dialogue.
Efficace et rapide, l’épistolaire numérique est trop souvent perçu comme lieu de l’échange banalisé, de format neutre et utilitaire, qui ne conserve de la tradition épistolaire que le matériau, l’écriture souvent télégraphique, alors qu’il peut tout aussi bien être le véhicule d’une proposition plus intime, plus engagée. Sur le Web, on écrit à quelqu’un ou à plusieurs, pour des destinataires ciblés ou anonymes, sur un modèle dynamique qui crée un effet de dialogue. Monologue, dialogue et polyphonie sont les trois formes de ces échanges, héritières du roman épistolaire.
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Inanimate Alice (navigation filmée #1)
Le récit de voyage justifie la forme épistolaire dans l’hypertexte de fiction Inanimate Alice de Christ Joseph et Kate Pullinger (2005). L’internaute est invité à parcourir un roman feuilleton, le récit intimiste du personnage principal, Alice, racontant son quotidien difficile et dispersé entre les continents. À la fois journal de bord, monologue intime,récit biographique et carnet de voyage, les formes épistolaires y sont nombreuses (messages texte, cartes postales, missives brèves).
Vévé (navigation filmée #1)
Vévé (2008), une œuvre de poésie générative de Sofian Audry, est basée sur des échanges de mots dont le dispositif constitue une métaphore de l’écriture en direct, conviant l’internaute à un exercice dialogique avec la machine.
La Bibliothèque des Rêves (navigation filmée #1)
La Bibliothèque des rêves de Jean-Jacques Rullier, en ligne depuis 1998, reçoit et conserve des récits de rêves fournis par les internautes afin de les inclure dans son développement rhizomatique. Cette bibliothèque des rêves persiste et se transforme au fil du temps car elle se présente comme un processus et non comme un objet fini, condition essentielle à la polyphonie en réseau.
Plagiairc (navigation filmée #1)
Le site Plagiairc, discuter avec les mots de autres, de Nicolas Boillot (2010) exploite le flux de paroles qui déferle sur Facebook. L’internaute y est invité à construire des phrases en sélectionnant sur l’écran des mots figurant dans une base de données. L’œuvre interroge le statut de la déclaration publique : chaque phrase devient l’objet d’une longue série d’appropriations, menées par des auteurs anonymes, contribuant à une esthétique du flux et de la citation.