Penser le contemporain

Aire de recherche consacrée à la théorisation et à la compréhension de la notion de «contemporain»

La fête de la consommation

Durant les semaines d’été, les rues de Montréal sont littéralement envahies par les «ventes de trottoir». À perte de vue sur Mont-Royal, sur Saint-Laurent, sur Sainte-Catherine, les badauds innombrables circulent le long des étalages et sous les tentes montées par les marchands, où s’empilent les grands déballages des fins de séries et des articles soldés. Il y a de la musique, des ballons, les enfants mangent de la barbe à papa, une odeur de saucisses grillées flotte dans l’air. Les familles, les poussettes, les chiens, les couples d’amoureux, les cyclistes forment une foule pittoresque, une cohue débordante et bon enfant, mi-acheteuse, mi-spectatrice. La rue prend une sorte de charme dans cette atmosphère de fête foraine. Qu’achète-t-on dans de telles circonstances?

«Ceci n'est pas une marchandise»?

C’est devenu un topos des discours alternatifs en tout genre: «ceci n’est pas une marchandise». «Ceci», c’est-à-dire au choix la culture, la santé, l’éducation, l’espace public, la nature, les gènes, etc. Le récent débat autour du financement de la culture nous en a encore donné un exemple. Alors que la nouvelle droite canadienne incarnée par Nathalie Elgrably-Lévy du Journal de Montréal et Krista Erickson de Sun News se lançait dans une attaque en règle contre les subventions de l’État aux arts et à la culture, la réponse du milieu culturel a été de soutenir que l’art, du moins celui qui ne serait pas tombé au statut de divertissement dépourvu de sens, n’est pas une marchandise, qu’il fonctionne selon une logique autre.

Le baiser

Nous avons assisté la semaine dernière à la naissance d'une icône photographique. Le monument visuel en question: un cliché de Richard Lam pris le 15 juin dernier où l'on voit «un couple qui s'embrasse durant les émeutes à Vancouver», pour reprendre la légende officielle fournie par l'agence Getty Images, propriétaire des droits de diffusion de la photographie. Le processus de canonisation de cette photographie est des plus classiques.

Corps à l’encan

De La dame aux camélias (1848) d’Alexandre Dumas, il nous reste surtout, à travers la pièce de théâtre qu’en tira l’auteur et l’opéra qu’en fit Verdi (La Traviata), l’histoire kitsch de l’amour d’un jeune homme pour une courtisane, histoire qui s’achève glorieusement dans le pathos, les larmes, le repentir, la réconciliation et la mort… Mais au-delà du cliché, ou pour mieux dire avant lui, La dame aux camélias est aussi un roman, beaucoup plus corrosif que la pièce et que l’opéra, et dont le propos concerne tout particulièrement l’économie. La prostituée y apparaît comme une figure cristallisant une alliance problématique propre à la modernité économique : celle du désir et de l’argent.

La réalité semblait de plus en plus stérile

Œuvre référencée: July, Miranda. (2007) «No One Belongs Here More Than You». Cette insistance sur l’incommunicabilité et sur la solitude du sujet contemporain m’apparaît importante en ce qu’elle adresse à notre époque des questions qui concernent ses fondements. Je ne crois pas qu’il s’agisse d’un hasard si tant d’oeuvres littéraires, ces dernières années, se montrent soucieuses quant à la solitude des individus et insistent à ce point sur l’importance des rapports intersubjectifs.

Ventes de garage et hedge funds

L’économie est l’un des systèmes de régulation les plus importants du monde contemporain. Il faut saisir la dimension historique et évolutive de cette prépondérance : c’est depuis les débuts de la révolution industrielle et tout au long du 19e siècle que l’économie a progressivement étendu son emprise sur toutes les sphères de la vie et qu’elle a eu tendance à s’imposer, au point de vue des représentations et dans son effectivité, comme système omniprésent. Je voudrai y revenir, en examinant en particulier ce qu'en dit le roman de l'époque, dans les prochaines semaines.

Scènes de cul postmodernes et autres allusions à la neuvième porte du corps

Œuvre référencée: DesRochers, Jean-Simon. (2009) «La canicule des pauvres». Nous avons donc entre les mains un «roman adressé à ceux qui ne lisent pas» et, ironiquement, c’est en faisant une analyse plus poussée des éléments inhérents à la littérature postmoderne que le lecteur plus aguerri trouve son compte. C’est donc dans cette optique que j’ai choisi de lire La canicule des pauvres et je vais montrer comment les multiples mises en abyme, l’intertextualité et les différentes formes d’intermédialité servent à générer l’autoréflexivité de l’œuvre et de son contexte d’édition.

Les aléas du gène: une typologie de la «fiction génétique»

Au cours des rencontres et discussions entourant le projet du Chantier Post-humain dans le cadre de l’OIC, nous avons déjà circonscrit quelques-uns des termes que l’on associe généralement au gène : l’ADN, la génétique et les généticiens, l’hérédité, la biologie moléculaire, les cellules, l’eugénisme, le clonage ou plus largement tout ce qui concerne ce que nous avons appelé ‘le corps dans tous ses états’. Il va donc sans dire que le terme même de "gène" est polysémique. Il renvoie à une quantité d’autres expressions, plus ou moins synonymiques, qu’on lui associe autant dans l’imaginaire de la fiction que dans la sphère proprement scientifique. Or, bien que le territoire occupé par l’objet "gène" soit tellement large qu’il ne permette pas d’en donner une définition claire, il reste que c’est justement autour du déploiement des différentes figures associées que se construisent bon nombre de fictions contemporaines.

Le contemporain et la crise: une relation nécessaire? (présence du DVG)

Quand j’ai lu pour la première fois René Girard au début des années 80 (dans un cours donné par André Vanasse sur la poétique de Dostoïevski), la portée de ses hypothèses sur le désir triangulaire, ainsi que sur le bouc émissaire et la crise sacrificielle dans les sociétés antiques m’avait grandement impressionné. J’admirais l’efficacité de ses thèses et l’éclairage immédiat qu’elles apportaient sur un état social sur lequel je ne m’étais pas encore interrogé, mais qui a, depuis, pris place au cœur de mes recherches. Cet état, c’est la crise et la violence qui lui est associée.

Brésil, corporalité, cyberpunk 5: Traduction de l'introduction de «Os Dias da Peste» (Les jours de la peste): retour sur le concept de Convergence (ou Singularité)

Le présent billet vient en réponse à l'interrogation de Jean-François Chassay au sujet de la façon dont la narration du livre de Fábio Fernandes joue sur l'écart entre le temps de l'écriture (pré-Convergence) et le temps de lecture (post-Convergence), sur un mode ironique. Il poursuit également la réflexion amorcée précédemment, lors de la présentation des deux romans de post-cyberpunk brésiliens, sur le concept de Singularité Technologique (appelée Convergence, dans le contexte du roman).

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